• #8Novembre16h48, combattre les inégalités salariales avec Negotraining
8 novembre 2024

#8Novembre16h48, combattre les inégalités salariales

Depuis 16h48 ce vendredi 8 novembre 2024, les femmes commencent à travailler gratuitement jusqu’à la fin de l’année en France, selon Les Glorieuses. Alors que les inégalités salariales sont encore trop présentes, focus sur une formation à la négociation salariale mise en place à Nantes.

#8Novembre16h48, combattre les inégalités salariales

08 Nov 2024

Depuis 16h48 ce vendredi 8 novembre 2024, les femmes commencent à travailler gratuitement jusqu’à la fin de l’année en France, selon Les Glorieuses. Alors que les inégalités salariales sont encore trop présentes, focus sur une formation à la négociation salariale mise en place à Nantes.

#8novembre16h48. Si la date de la campagne de sensibilisation des Glorieuses, newsletter féministe lancée par Rebecca Amsellem, recule légèrement chaque année, signe d’une faible progression, les inégalités salariales persistent en 2024. Avec 13,9% d’écart salarial entre les femmes et les hommes à équivalent temps plein en France, et 23% tout temps de travail confondu[1], le combat pour l’égalité salariale reste un enjeu d’actualité.

 

Des facteurs d’inégalités profondément ancrés

Les causes de ces inégalités salariales sont nombreuses. On retrouve, d’une part, des facteurs systémiques : « Des normes de genre et stéréotypes de genre qui sont préexistants depuis malheureusement de nombreuses années et intégrés parfois depuis l’enfance, une représentation genrée des rôles où, souvent, les rôles féminins sont dévalorisés. » , précise Ameline Bordas, sociologue de formation et pilote du dispositif de coaching gratuit #NégoTraining lancé par Audencia à Nantes.

« La valeur économique des activités dites masculines ; les secteurs techniques, ingénierie, … rapportent plus à l’économie, donc sont plus valorisés » que des secteurs professionnels plus féminins comme les métiers du « care » — activités liées aux soins à autrui — pourtant fondamentaux.

Ameline Bordas témoigne également de retours partagés dans le secteur du recrutement : « Ils vont juger plus négativement une femme qui va demander à revoir sa rémunération, plutôt qu’un homme. Alors que la femme le mérite tout autant que l’homme. Même si les mentalités changent, on attend d’une femme qu’elle soit plutôt coopérative. »

Toutes ces discriminations vont influencer le comportement futur : en étant moins valorisées, les femmes ont moins confiance en elles.

Enfin, parmi les facteurs aggravants des inégalités salariales, la parentalité est souvent négligée. Pourtant le choix du secteur d’activité, le temps de travail ou encore les opportunités de carrière sont fortement liés à la parentalité. Malgré une évolution sociétale indéniable, la charge de la parentalité reste très féminine, avec une forte charge mentale. [2]

 

Le programme de formation #NégoTraining

En 2016, lors d’une étude dans le cadre de la création de la plateforme responsabilité sociétale des entreprises (RSE) de la métropole nantaise, la Chaire Impact Positif d’Audencia et Nantes métropole font le « constat qu’il y a des inégalités salariales entre les femmes cadres et les hommes cadres plus importantes en métropole nantaise que dans d’autres métropoles de France. »
Souhaitant agir concrètement sur le territoire, une formation à la négociation de salaire, à destination des femmes et totalement gratuite, est alors lancée en 2017 : #NégoTraining.
Son premier objectif est de sensibiliser les femmes, « déconstruire les inégalités de salaire, se rendre compte qu’elles ne sont pas seules. »

« Cela permet de passer par un levier individuel, en travaillant sur la négociation car on est parti d’un constat clair : les femmes négocient moins leur salaire que les hommes, et quand elles vont négocier, elles vont négocier moins que les hommes. Donc finalement c’est un peu la double peine. » , précise Ameline Bordas. En effet, 1 femme sur 2 n’a pas osé demander une augmentation salariale vs 28% pour les hommes. [3]

Jeu de rôle entre deux participantes lors d’un atelier #NégoTraining ©F.Sénard/Audencia

Si la catégorie cadres est la catégorie où il y a le plus d’inégalité dans le secteur privé, le dispositif a déjà été adapté pour que la formation puisse s’adresser à des femmes éloignées de l’emploi ou des personnes moins favorisées, mais « c’est assez compliqué de proposer une formation à la négociation de salaire quand la principale discrimination de ces personnes c’est l’accès à l’emploi. » , rappelle Ameline Bordas.  La formation est cependant un succès : « L’objectif initial était de former 100 femmes cadres sur le territoire nantais, on a formé plus de 5400 femmes sur toute la France ! »

 

Responsabilité individuelle VS responsabilité patronale

Dans une société moderne fortement portée sur le développement personnel, les nombreuses injonctions envers les femmes à multiplier les initiatives pour obtenir leurs droits peuvent sembler contradictoires avec la notion d’égalité recherchée.

« Les inégalités se réduisent mais elles sont encore bien trop présentes » malgré « toutes les initiatives qui existent aujourd’hui ; il y a eu #MeToo, il y a eu une prise de conscience des inégalités femmes/hommes et des inégalités économiques » mais l’évolution est lente et l’on constate qu’ « à chaque crise, cela va se répercuter davantage sur les femmes. » , analyse Ameline Bordas, cheffe de projet Études et Recherche à Audencia et pilote du dispositif #NégoTraining.

4% de discrimination pure, c’est aujourd’hui l’écart de revenu à poste et compétence équivalents pour une femme et un homme, « que l’on explique uniquement par les stéréotypes de genre. » [4]

« Le premier levier d’action est de lutter contre les stéréotypes dès le plus jeune âge, agir sur l’orientation des femmes et les attirer dans les secteurs plus rémunérateurs, en adaptant aussi les conditions de travail. »

Il faut ensuite continuer de sensibiliser et pousser les entreprises à agir, avec la législation, notamment par l’index d’égalité femmes/hommes et l’obligation de transparence des salaires qui a donné de bons résultats dans d’autres pays. [5]
Une remise en question plus profonde des entreprises est désormais nécessaire car l’enjeu n’est pas seulement économique, il touche à la cohésion sociale et à l’égalité des chances.

 

Info utile :
Prochaine session de formation #NégoTraining en présentiel le 14 novembre 2024 (17h30-20h30) en simultanée dans plusieurs villes de France, dont Nantes et Paris, dans les locaux de KPMG France.
Inscription gratuite : https://negotraining.org/villes

Sources :
[1] et [4] INSEE
[2] et [3] Baromètre de l’égalité professionnelle femmes/hommes 2023, Chaire Impact Positif d’Audencia.
[5] Rapport d’impact des Glorieuses, 2024

Photo en couverture ©F.Sénard/Audencia

Tout droit arrivée de Paris où elle a vécu les 15 dernières années, Amandine est à Nantes depuis seulement quelques mois. Pourtant, sa connaissance du calendrier culturel et son ancrage dans le quartier révèlent plutôt une femme capable de trouver toutes les occasions pour faire des rencontres et de s’imprégner de l'imaginaire nantais.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017