5 novembre 2019

Une adolescence québécoise en avant-première

Le film québécois « Une colonie », lauréat de l'Ours d'argent du meilleur film au festival de Berlin et de deux Canadian Screen Awards (meilleur film et meilleure actrice), était présenté en avant-première au cinéma Gaumont de Nantes le 1er novembre. Il sort en salle aujourd'hui, mercredi 6 novembre. Découverte.

Une adolescence québécoise en avant-première

05 Nov 2019

Le film québécois « Une colonie », lauréat de l'Ours d'argent du meilleur film au festival de Berlin et de deux Canadian Screen Awards (meilleur film et meilleure actrice), était présenté en avant-première au cinéma Gaumont de Nantes le 1er novembre. Il sort en salle aujourd'hui, mercredi 6 novembre. Découverte.

Dans une petite salle bien pleine du Gaumont place du Commerce, les invités à cette avant-première ont été accueillis par le représentant du distributeur du film, Wayna Pitch, société de distribution de longs-métrages basée à Nantes.

D’emblée, il a annoncé avoir eu la chance, avec son équipe, d’assister à la projection de « Une colonie » à Berlin : « le lendemain, on avait tous les larmes aux yeux en reparlant du film. C’est tellement rare qu’on était tous d’accord pour s’occuper de sa distribution française. »

 

[aesop_image imgwidth= »40% » img= »https://www.fragil.org/wp-content/uploads/2019/11/Une-Colonie-Panneau-HD.jpg » credit= »Wayna Pitch » align= »center » lightbox= »on » caption= »En salle le 6 novembre » captionposition= »center » revealfx= »off » overlay_revealfx= »off »]

Portrait d’adolescence

Le pitch : Mylia, une enfant timide et farouche, s’apprête à quitter sa campagne natale pour la grande école. À la recherche de repères dans ce milieu qui lui semble hostile, elle apprendra à mieux se connaître à travers la rencontre de Jimmy, un jeune autochtone marginal de la réserve voisine. Mylia avancera comme elle peut, parfois maladroitement, en se frottant à l’absurdité de l’adolescence, à ses malaises et à ses petites victoires.

 

[aesop_image imgwidth= »50% » img= »https://www.fragil.org/wp-content/uploads/2019/11/1.MYLIA-TÊTE-EN-BAS_Emilie-Bierre_credit-Danny-Taillon.jpg » credit= »Danny Taillon » align= »center » lightbox= »on » caption= »Emilie Bierre dans le rôle de Mylia » captionposition= »center » revealfx= »off » overlay_revealfx= »off »]

« Une colonie » nous propose le portrait d’une adolescente qui se cherche dans un monde nouveau pour elle, celui du secondaire (le collège au Canada). Elle y découvre de nouveaux amis et une nouvelle ambiance, loin du calme de son quotidien.

La prestation des deux jeunes filles, Emilie Bierre dans le rôle de Mylia et Irlande Côté dans le rôle de sa petite sœur Camille, est remarquable et tout le temps très juste, chacune dans son registre : Mylia, timide et introverti, Camille, impétueuse et facétieuse.

[aesop_image imgwidth= »50% » img= »https://www.fragil.org/wp-content/uploads/2019/11/3.CAMILLE-BOUE_Irlande-Cote_credit-Lena-Mill-Reuillard-_-Etienne-Roussy.jpg » credit= »Lena Mill-Reuillard » align= »center » lightbox= »on » caption= »Irlande Côté dans le rôle de Camille » captionposition= »center » revealfx= »off » overlay_revealfx= »off »]

La photographie du film est également à noter. Les couleurs sont pastels, rappelant quelque peu la nostalgie et les souvenirs dans lesquels la réalisatrice a cherché à nous plonger.

Rencontres

A la fin du film, la réalisatrice Geneviève Dulude-De Celles et son actrice principale Emilie Bierre sont apparus pour répondre aux questions des spectateurs.

 

[aesop_image imgwidth= »50% » img= »https://www.fragil.org/wp-content/uploads/2019/11/IMG_20191101_222632.jpg » credit= »Anaïk Viollin » align= »center » lightbox= »on » caption= »la réalisatrice Geneviève Dulude-De Celles et son actrice principale Emilie Bierre » captionposition= »center » revealfx= »off » overlay_revealfx= »off »]

Il a tout d’abord été question du titre, colonie. La réalisatrice a expliqué qu’il avait plusieurs sens. La colonie de jeunes, la colonie politique en écho aux passages évoquant la réserve voisine.

Un spectateur a ensuite pris la parole pour féliciter les choix artistiques du film, notamment la lumière des plans.

Un jeune homme a interrogé les deux femmes sur le tournage. Sa durée ? Les conditions ? Le tournage de ce film a duré 28 jours. C’est peu au regard de ce qui se fait en France. En revanche, la réalisatrice nous a confié avoir bénéficié de deux mois de répétitions avec ses actrices et acteurs. Ce qui a permis de créer une véritable complicité dans l’équipe, notamment entre Emilie Bierre et Irlande Côté, sœurs dans le film. Complicité flagrante tant les deux jeunes filles semblent sur la même longueur d’onde.

[aesop_image imgwidth= »50% » img= »https://www.fragil.org/wp-content/uploads/2019/11/3.-GENEVIÈVE-DULUDE-DE-CELLES-réalisatrice_crédit-Ninon-Pednault.jpg » credit= »Ninon Pednault » align= »center » lightbox= »on » caption= »La réalisatrice Geneviève Dulude-De Celles et son actrice principale Emilie Bierre  » captionposition= »center » revealfx= »off » overlay_revealfx= »off »]

En tant que salarié d’une association d’éducation aux médias et aux pratiques numériques, j’ai posé la question qui me taraudait depuis que les lumières étaient rallumées : « Etait-ce un choix conscient de faire, en 2019, un portrait d’adolescente sans évoquer les nouvelles technologies, les smartphones et les réseaux sociaux ? » Geneviève Dulude-De Celles m’a répondu qu’elle y avait beaucoup réfléchi et que c’était une volonté que son personnage ne soit pas dans cet esprit 2.0. Selon elle, un eprsonnage prend ce thème sur lui, c’est celui de Jacynthe, la jeune fille qui accompagne Mylia au collège, l’invite dans une fête et qui a son téléphone quasiment greffé à sa main.

Les deux femmes ont chaleureusement été applaudis par les spectateurs et spectatrices, heureux d’avoir eu accès aux secrets de fabrication de ce film, auquel on espère tout le succès qu’il mérite.

Réalisateur de formation, Merwann s’intéresse à la musique, à la littérature, à la photographie, aux arts en général. De juillet 2017 à juillet 2023, il a été rédacteur en chef du magazine Fragil et coordinateur de l'association.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017