25 juin 2020

Manifestation du 20 juin 2020 : l’accès aux droits des personnes sans-papiers, problématique toujours d’actualité

A l'occasion de la Journée mondiale des réfugiés samedi 20 juin 2020, l'appel au rassemblement pour l'accès aux droits des personnes exilées a mobilisé plusieurs centaines de manifestant·e·s.

Manifestation du 20 juin 2020 : l’accès aux droits des personnes sans-papiers, problématique toujours d’actualité

25 Juin 2020

A l'occasion de la Journée mondiale des réfugiés samedi 20 juin 2020, l'appel au rassemblement pour l'accès aux droits des personnes exilées a mobilisé plusieurs centaines de manifestant·e·s.

 

Le rendez-vous était fixé à 15h00, place du Bouffay. En attendant les prises de parole des militant·e·s et des personnes exilées, une chorale entonne un chant bulgare, aux pieds de la statue de Philippe Ramette. De nombreuses banderoles sont déployées, réclamant notamment la régularisation immédiate et sans condition de toutes les personnes sans-papiers, l’accès au logement mais aussi la fermeture des Centres de Rétention Administrative.

©Khoukha HENNIÈNE
La régularisation, indispensable pour l’accès au travail et au logement

Un combat de longue haleine

La première prise de parole de l’après-midi est une lecture à deux voix faite par un militant et une personne exilée. Le texte a été rédigé par le Collectif des Sans-Papiers de Nantes et rappelle les conditions de vie extrêmement difficiles des personnes sans-papiers, réclamant la prise en considération des droits fondamentaux de ces dernières.

Plusieurs personnes exilées vont prendre la parole par la suite, chacune livrant à sa manière son ressenti et son vécu depuis l’arrivée en France. Le premier homme qui s’exprime, un peu timidement, remercie de l’aide et du soutien apportés par les associations, les bénévoles et les militant·e·s depuis son arrivée en France, il y a deux ans. Ces remerciements sont également exprimés par la personne qui lui succède, auxquels s’ajoute la demande d’obtenir l’autorisation de travailler :

« On demande pas beaucoup de choses, on demande juste l’autorisation de travail, parce qu’il y a beaucoup d’exploitation ici. On vit dans l’humanité, on a le droit à la dignité. »

La régularisation et l’accès à l’emploi reviennent également dans les prises de paroles suivantes, pour pouvoir « vivre comme les autres » et faire vivre sa famille, comme l’explique cet homme père de 4 enfants, en France depuis plus de 3 ans. L’absence de papiers génère des situations particulièrement précaires, comme en témoigne la personne suivante : venue en France avec sa fille très malade, elle se retrouve en situation irrégulière, et par conséquent sans logement et sans ressources. Elle exprime ses remerciements aux personnes présentes au rassemblement, mais aussi sa détresse :

« Ma fille souffre et moi je souffre avec elle. Si je quitte la France,  je condamne ma fille! »

©Khoukha HENNIÈNE
Banderole de l’association GASPROM, qui aide et accompagne les personnes immigrées

Pour la reconnaissance des droits fondamentaux

Après les prises de parole, une marche est lancée en direction de la Préfecture, dans une ambiance plutôt joyeuse et détendue malgré la gravité des situations vécues par l’ensemble des personnes exilées. Les slogans réclamant des papiers, ainsi qu’un travail et un logement, sont scandés tout au long de la marche. À la tête du cortège d’environ 400 personnes, les personnes exilées invitent les passants à rejoindre le mouvement, précisant qu’il s’agit d’une manifestation non-violente.

À l’arrivée à la Préfecture, l’institution responsable de la délivrance des titres de séjour et des papiers d’identité, de nouvelles prises de parole rappellent les revendications des personnes exilées concernant le respect de leurs droits fondamentaux, notamment à l’approche de la fin de l’état d’urgence sanitaire prévue le 10 juillet :

« On espère que ce moment va être l’occasion de poser un premier geste fort, il faut s’attendre à des expulsions et à [devoir] revendiquer des logements! »

Les banderoles sont accrochées à l’entrée du bâtiment, puis le cortège reprend sa route en direction du Conseil Départemental de Loire-Atlantique, chargé notamment de la protection des personnes exilées mineures et plusieurs fois condamné pour manquements à cette mission. La marche emprunte ensuite le Cours Saint-Pierre, au cri des slogans « Urgence, urgence, ouvrez les frontières, la Méditerranée est un cimetière! », mais aussi  » Nous sommes tous des enfants des migrants, première, deuxième, troisième génération! ». Le cortège se dirige pour finir vers Commerce, où la manifestation prend fin dans le calme, à la croisée des trams, aux alentours de 17h30.

Éducatrice spécialisée de métier, je suis particulièrement intéressée par les problématiques sociales et politiques. Passionnée par la musique, la danse, le chant et la lecture, je suis aussi investie dans plusieurs associations culturelles nantaises. En écrivant pour Fragil, c'est cette diversité que je souhaite illustrer et mettre en avant.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017