9 mars 2022

Les élèves de Nelson Mandela prennent « conscience des problèmes » en créant un média contre la haine en ligne

Début 2022, l'association Fragil a accompagné une classe de 1ère du lycée nantais Nelson Mandela avec pour objectif de créer un média traitant de lutte contre la haine en ligne. Pendant six semaines, les élèves ont développé leur capacité à travailler en groupe, pratiquer le journalisme et questionner le monde qui les entoure.

Les élèves de Nelson Mandela prennent « conscience des problèmes » en créant un média contre la haine en ligne

09 Mar 2022

Début 2022, l'association Fragil a accompagné une classe de 1ère du lycée nantais Nelson Mandela avec pour objectif de créer un média traitant de lutte contre la haine en ligne. Pendant six semaines, les élèves ont développé leur capacité à travailler en groupe, pratiquer le journalisme et questionner le monde qui les entoure.

« J’ai découvert qu’il y avait des comptes qui luttait contre les fichas » témoigne une élève lors de la dernière séance du projet de création d’un média traitant de « la lutte contre la haine en ligne ». Un des reportages réalisés par les élèves de cette classe de 1ère du lycée Nelson Mandela de Nantes a traité précisément de cette pratique, courante chez les ados, « d’afficher » des photos souvent dégradantes de leurs camarades sur les réseaux sociaux.

Créer un média collaboratif pour souder la classe

Durant six ateliers de deux heures répartis de janvier à mars, l’association Fragil est intervenue au sein du lycée pour accompagner cette classe d’une vingtaine d’élèves dans leurs premiers pas en tant que journalistes. De la découverte de la méthode journalistique à la publication de reportages sur un média créé ad hoc, les élèves ont apprécié « travailler en groupe », « réaliser des interviews » et tiré de la fierté d’avoir « complété la page [ndlr: le compte instagram] à temps« . Cette page a d’ailleurs été un vecteur de cohésion dans la classe. Lors de la première séance, un élève a fait part de ses doutes quant à la capacité du groupe à s’entendre sur la gestion collective du média : »vous êtes sûrs ? Y’en a qui vont faire n’importe quoi« . Cet a priori s’est dissipé peu à peu, notamment grâce à la volonté de l’animateur d’impliquer au maximum les élèves dans chaque étape de la création du média. Le groupe a en effet débattu pour choisir Instagram afin de publier leurs reportages. Le nom du média a lui aussi été choisi à travers l’organisation d’un vote par la classe, qui, malgré quelques difficultés démocratiques a réussi à s’entendre sur « mandelacyber.tv« . Point culminant de ce travail d’équipe : la création d’une charte d’utilisation du compte commune réalisée et signée en 20 minutes par l’ensemble de la classe. « J’ai aimé ce projet, car nous étions en coopération« , affirmera l’une des élèves lors de la publication des reportages.

Une manière de s’informer sur un sujet primordial pour les élèves

Même si ce projet a paru « parfois trop long » pour quelques élèves, un lycéen confessera que « devoir faire un travail [sur ce sujet] permet de prendre conscience des problèmes« . Un sentiment partagé dans la classe qui a pu faire un travail de recherche sur plusieurs thématiques liées à la haine en ligne telles que le cyber-harcèlement, le cyber-sexisme ou encore le racisme sur les réseaux sociaux. Chaque groupe a dû trouver des sources qualifiées et réaliser des interviews en lien avec son sujet et son angle : le proviseur de l’établissement à propos de la lutte contre le cyber-harcèlement à Nelson Mandela, une militante de l’association « Marion la main tendue » qui lutte contre le harcèlement scolaire, des victimes de cyber-harcèlement. Autant de témoignages qui ont alimenté des reportages de qualité dans des formes variées : vidéo, audio ou texte.

Le compte mandelacyber.tv créé par la classe

Un projet répété dans plusieurs lycée avec des résultats convaincants

Après ceux de St-Stanislas et Jules Verne, ce sont donc les élèves d’une troisième classe de lycée qui ont été accompagnés par Fragil dans la création d’un média sur Instagram cette année, toujours sur la thématique de la lutte contre la haine en ligne, grâce au financement de la DRAC Pays de la Loire. Au vu des retours des élèves et de leur implication dans le projet, il semble que ce genre d’action soit réellement efficace pour faire réfléchir ces futurs adultes sur leur compréhension du fonctionnement des médias et du journalisme ainsi que sur l’engagement citoyen contre les cyber-violences.

 

 

Chargé de projets numériques et médiatiques chez Fragil depuis 2017, musicien, auteur, monteur... FX est un heureux touche-à-tout nantais. Il s'intéresse aux musiques saturées, à l'éducation aux médias, aux cultures alternatives et aux dystopies technologiques.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017