22 novembre 2022

Daniel Waro, l’infatigable défenseur du créole viendra chanter le 22 novembre au Piano’cktail à Bouguenais

À La Réunion, ce «petit blanc» a milité tour à tour comme communiste, autonomiste et indépendantiste. Mais aujourd’hui, c’est avec ses chansons en créole que cet artiste renommé continue le combat de sa vie : défendre sa langue, sa culture, son identité. Mardi 22 novembre, le maloya résonnera haut et fort au Piano’cktail de Bouguenais.

Daniel Waro, l’infatigable défenseur du créole viendra chanter le 22 novembre au Piano’cktail à Bouguenais

22 Nov 2022

À La Réunion, ce «petit blanc» a milité tour à tour comme communiste, autonomiste et indépendantiste. Mais aujourd’hui, c’est avec ses chansons en créole que cet artiste renommé continue le combat de sa vie : défendre sa langue, sa culture, son identité. Mardi 22 novembre, le maloya résonnera haut et fort au Piano’cktail de Bouguenais.

A l’origine, il y a 350 ans, le maloya servait à exprimer la douleur et la révolte des esclaves venu·es d’Afrique ou de Madagascar. Il était chanté et dansé dans les plantations sucrières pour rendre hommage aux ancêtres. À La Réunion, il s’est créolisé et a subi les influences du jazz, du reggae, du rock et du slam. Mais il est toujours considéré comme l’âme de cette civilisation métissée. En 2009, l’UNESCO l’a classé «patrimoine culturel immatériel de l’humanité».

Mais pour Daniel Waro, l’un des plus célèbres héritiers de cette tradition, il reste encore beaucoup de chemin à parcourir pour lui donner ses lettres de noblesse.

«À La Réunion, celui qui réussit, qui a une belle maison, une belle voiture, c’est celui qui parle le français» s’insurge-t-il. «Celui qui s’exprime en créole, parle forcément mal».

Les préjugés d’infériorité

Pour lui, le français est encore la langue dominante et véhicule toujours les vieux préjugés d’infériorité par rapport à la langue des colonisateurs.

«Le français impose son modèle de République une et indivisible» poursuit Daniel Waro. «Il uniformise et balaye tout. Le jour où l’on apprendra à l’école comment vit un créole, comment il se nourrit, comment il plante, comment il élève ses animaux, là oui, il y aura une vraie reconnaissance».

Daniel Waro admet qu’il y a eu des progrès. A partir de la 4ème, on peut apprendre le créole en option. Il existe bien quelques classes bilingues et on peut passer le CAPES et l’agrégation en créole mais pour lui ce n’est pas assez.

«Ça reste toujours un parcours du combattant de vouloir réussir ses études en créole» explique-t-il. «Il faut forcer les portes et c’est pareil pour se marier en créole. Sans l’accord du maire, c’est impossible à obtenir».

Le créole, une langue à part entière

Le créole est en fait un mélange de français, de portugais, de malgache et il se prononce avec des accents différents selon que c’est un indien, un camerounais ou un malgache qui parle. Mais comme le français, il a sa grammaire, sa conjugaison, son vocabulaire, ses mots propres.

«Le créole est une langue à part entière» insiste Daniel Waro. «Il a ses poètes, ses écrivains. C’est une histoire, une civilisation, celle des esclaves».

Oui mais voilà. Officiellement pour la France, le créole est une langue régionale au même titre que le breton, le corse ou le basque. Une langue mineure en somme, en tout cas inférieure à celle de Molière, de Descartes ou de Victor Hugo.

Et c’est ce qui amène Daniel Waro a continuer ce combat politique au travers de ses concerts, lui le fils d’ouvrier agricole et de militant communiste, né au Tampon en 1955. Lui, le rebelle dans l’âme, l’amoureux de Brassens, l’anarchiste et le fabricant d’instruments typiques de La Réunion.

Mardi 22 novembre, il viendra chanter  le maloya. à l’invitation du Piano’cktail, le théâtre municipal de Bouguenais, et de l’association Le Nouveau Pavillon, qui défend les musiques du monde et organise le festival Eurofonik.

Daniel Waro credit photo Thierry Hoareau

 

 

Quand on a été journaliste pendant plus de 30 ans à France 3, que l'on s'est enrichi de belles rencontres et de découvertes, on a envie de continuer à partager sa curiosité et son ouverture d'esprit avec d'autres. En travaillant bénévolement à Fragil, on peut continuer à se cultiver en toute liberté. Ca donne du sens à un retraité devenu journaliste honoraire.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017