29 novembre 2022

Friperies nantaises: le business grandissant

Alors que de plus en plus de friperies voient le jour, elles reposent sur l’envie des consommateur·trices d’être de plus en plus protecteur·trices de l’environnement, mais également de ne pas vider son porte monnaie alors que les prix grimpent. Enquête sur ce business méconnu qui attire de plus en plus d’investisseur·euses.

Friperies nantaises: le business grandissant

29 Nov 2022

Alors que de plus en plus de friperies voient le jour, elles reposent sur l’envie des consommateur·trices d’être de plus en plus protecteur·trices de l’environnement, mais également de ne pas vider son porte monnaie alors que les prix grimpent. Enquête sur ce business méconnu qui attire de plus en plus d’investisseur·euses.

Les friperies ressemblent à ce que certaines personnes pourraient appeler « brocante à vêtements ». Quand on parle de friperie, on peut penser à des applications mobiles comme Vinted ou Vestiaire Collective, dont les pubs passent souvent à la télé. Mais à l’heure actuelle, on compterait plus de 13 000 friperies physiques en France et nous en comptons près d’une cinquantaine dans l’agglomération nantaise. Ces chiffres montrent la montée en puissance de la seconde main, sachant que selon une étude de Fashion Network un quart des Français achèteraient des vêtements d’occasion. Bien que bon nombre de personnes pensent que ce phénomène soit nouveau, en réalité le principe des friperies a été créé dès le Moyen-âge car les personnes n’appartenant pas à la noblesse ou aux hommes d’Église n’avaient pas les moyens de s’offrir des vêtements neufs.

[aesop_image img= »https://www.fragil.org/wp-content/uploads/2022/11/friperie-moyen-age.png » panorama= »off » imgwidth= »50% » align= »center » lightbox= »on » captionsrc= »custom » caption= »Gravure d’un Fripier de la fin du fin XVIIe siècle, auteur inconnu » captionposition= »center » revealfx= »off » overlay_revealfx= »off »]

7 Milliards d’euros de chiffres d’affaires annuel

Avec un chiffre d’affaires estimé à 7 milliards d’euros en 2021, le marché de la seconde-main est en pleine expansion. Malheureusement, il est impossible de calculer le chiffre d’affaires moyen d’une friperie, car il ne faut pas oublier qu’internet propulse grandement ce chiffre vers le haut. Côté Nantais, vous êtes forcément déjà passé devant une des vingt friperies placées dans le centre-ville. Fragil s’est rendue dans plusieurs de celle-ci et à chaque fois aucun chiffre d’affaires n’a été dévoilé, avec toujours la même réponse « les marges restent à peu près les mêmes que dans tous les commerces. »

Preuve d’un business qui fonctionne ou simple envie d’investir, le désormais groupe nantais « Frip’in shop » à ouvert un quatrième magasin physique, toujours en Loire-Atlantique, en plus du site internet créé lui aussi récemment.

Nantes a par ailleurs accueilli le premier marché de friperies de France. Depuis mi-juin, 6 stands différents prennent place tous les mercredis et premier samedi du mois de 11h à 19h, place des Petits Murs.

Grossiste, grossiste et grossiste

Après avoir été à la rencontre de plusieurs d’entre elles, on comprend mieux le fonctionnement de celle-ci. Il faut savoir que les friperies ne vendent pas toutes la même chose. Certaines s’orientent sur du vintage avec des vêtements des années 80 à 2000, d’autres fournissent des vêtements modernes, et enfin les dernières sont généralistes et adjugent tous les types de vêtements.

Les friperies se fournissent chez des grossistes, mis à part celles sur internet qui relient deux particuliers. Les grossistes obtiennent les vêtements directement du fabricant qui fixe un prix, car le grossiste achète en grande quantité. Certaines boutiques qui ferment, permettent aux grossistes d’acheter des vêtements neufs encore moins cher. En bref, l’acheteur économise environ 60 à 70 % du prix du vêtement et « s’octroie une qualité car il peut s’assurer que le produit a déjà bien résisté. »

« Pas 100 % écologique »

Brisons-les pensées, car non les friperies ne sont pas totalement écologiques. Les sites et applis de seconde-main en sont le pur exemple. Quand nous achetons un vêtement d’un quelconque magasin ou sur Vinted, il est parfois difficile de le renvoyer ou celui-ci ne nous plaira plus dans quelques jours et nous allons penser que ce n’est pas grave car dans tous les cas nous pourrons le revendre sur un site de seconde main. Pour aller plus loin, tous les sites de seconde-main et utilisateurs de ceux-ci participent à l’engrenage de la surconsommation. Il ne faut pas non plus oublier que tous ces envois de colis corrèlent avec toujours plus de transports.

Pour la friperie Nantaise Ronin, « le plus écologique reste tout de même de garder ses vêtements le plus longtemps et avoir de la qualité ». Si certaines fripes réfléchissent dans le durable, d’autres s’éloignent de cet objectif en optimisant 100 % de ce business lucratif.

Reste à savoir si la fast-fashion (ndlr: production de vêtements rapide, régulière et pour pas cher) pourrait se mettre au durable. Une affaire qui est de plus en plus à l’ordre du jour et qui pourrait alors éteindre les friperies.

Journaliste en devenir. Fan de sport et de Géopolitique, j’essaye de rédiger des articles sur des faits de sociétés.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017