30 novembre 2022

Cirque Zavatta : un spectacle à la sauce espagnole pour ses dix ans à Vertou

Depuis le 15 octobre dernier, son chapiteau rouge et blanc fait face à la zone commerciale de Vertou. Avec un tout nouveau spectacle intitulé Olé !, le Cirque Nicolas Zavatta reprend du service pour une 10ème saison sous le signe de l’Espagne. Allons voir de plus près à quoi cela ressemble.

Cirque Zavatta : un spectacle à la sauce espagnole pour ses dix ans à Vertou

30 Nov 2022

Depuis le 15 octobre dernier, son chapiteau rouge et blanc fait face à la zone commerciale de Vertou. Avec un tout nouveau spectacle intitulé Olé !, le Cirque Nicolas Zavatta reprend du service pour une 10ème saison sous le signe de l’Espagne. Allons voir de plus près à quoi cela ressemble.

Vendredi 4 novembre, 15h30. Une demi-heure avant le début du show, une file d’attente conséquente s’est déjà massée, longeant les barrières du terrain privé où ce « zénith itinérant » a désormais ses habitudes. Dans la file, un grand nombre d’enfants se préparent à leur baptême de cirque. L’occasion pour les parents de Charlotte, 3 ans, de pousser la toile après plusieurs années : « On a aimé le cirque, c’est un univers qui nous plaît. Mais nos enfants grandissant, […] cela fait un moment que l’on n’est pas venus. C’est un retour », nous confient-ils avant le passage au guichet.

Le temps de trouver une place assise au milieu des familles en grappes dans les gradins, et la magie peut opérer. Près de deux heures durant, sans compter les vingt minutes d’entracte, les numéros s’enchaînent, sous la houlette de Monsieur Loyal, portés par une musique aux accents ibériques. Les danseuses de flamenco donnent le tempo et tapent du pied de tout leur frénétisme sur la piste. Les clowns redoublent de ruse pour attirer un spectateur sur scène ; l’immobiliser sur un panneau de bois ; enfermer sa tête dans un sac ; et lui faire croire, pour le plaisir de tous·tes, que les ballons placés de part et d’autre du dit sac et sous son entrejambe sont percés par un faux lanceur de couteaux.

Ces intermèdes laissent ensuite place à des numéros autrement plus périlleux. Un numéro gracieux de tissu aérien en couple, original car la femme porte également l’homme, et pas seulement l’inverse. Un adolescent qui tient en équilibre sur cinq plates-formes progressivement superposées, elles-mêmes en équilibre sur un cylindre en mouvement. Un jongleur de diabolos enflammés, qu’il embrase de sa bouche remplie d’essence. Et pour finir, le « Globe de la mort », sphère métallique de cinq mètres de diamètre dans laquelle trois motos s’entrecroisent à toute vitesse, avec autour des centaines de paires de paupières éberluées.

[aesop_image img= »https://www.fragil.org/wp-content/uploads/2022/11/boule.jpg » panorama= »off » imgwidth= »50% » credit= »Louis Chauvin » align= »center » lightbox= »on » captionsrc= »custom » caption= »Le Globe de la mort a fait s’entrecroiser trois motards à 360° » captionposition= »center » revealfx= »off » overlay_revealfx= »off »]

Et sans oublier les animaux. Le cirque Zavatta leur fait la part belle. La ménagerie comporte pas moins de 45 spécimens des plus exotiques, y compris des bébés. Et les équipes n’hésitent pas à nous en présenter une grande partie durant la représentation. Fauves, chameaux, chevaux, poneys exécutent successivement leurs révérences rituelles à des enfants ébahis par de tels tableaux. Des lamas tournent même autour de la piste, face à l’assistance qui ricane et retient son souffle devant de potentiels postillons. Cet éventail d’espèces est possible grâce à l’opiniâtreté de la direction, qui revendique le bien-être et l’affection apportés à ses bêtes, elle précise bien que la loi interdisant les animaux sauvages dans les cirques n’a vocation à être entérinée qu’en 2028. « Ce n’est pas qu’un métier, c’est une culture. Nos animaux, ce sont comme des animaux de compagnie, comme des chiens. On a grandi avec. Il y a un lien qui se crée », nous confie Fredo Douchet, directeur de la troupe.

[aesop_image img= »https://www.fragil.org/wp-content/uploads/2022/11/chameaux-scaled.jpg » panorama= »off » imgwidth= »50% » credit= »Louis Chauvin » align= »center » lightbox= »on » captionsrc= »custom » caption= »Le cirque Zavatta compte 45 animaux nés et élevés au sein de la ménagerie » captionposition= »center » revealfx= »off » overlay_revealfx= »off »]

Un spectacle entre respect des traditions et adaptation aux modes

Si la franchise met un point d’honneur à se moderniser technologiquement, il n’en demeure pas moins qu’elle s’inscrit dans la pure tradition du cirque itinérant. Pour qui est du renouvellement du genre, les clowns ont des LED incrustés dans leur costume, les voltigeur·euse·s sont agrémenté·e·s de jeux nourris de lasers, et Zavatta mise avant tout sur la refonte annuelle de son programme. En changeant le spectacle, le public, qui ne pourrait pas venir toutes les semaines, n’a pas le temps de se lasser. Pour prévenir cette lassitude, à l’instar des 250 cirques présents rien que sur le territoire métropolitain, la direction est en recherche constante de numéros accrocheurs, et fait appel tous les ans à des artistes du monde entier. À titre d’exemple, cette année, la famille Douchet accueille en son sein des Polonais, des Roumains, des Cubains, et des Espagnols. Toutes ces cultures se rejoignent et nous offrent un mélange détonnant, à grand renfort de fanfare, de couleurs vives et de paillettes.

[aesop_image img= »https://www.fragil.org/wp-content/uploads/2022/11/lion.jpg » panorama= »off » imgwidth= »50% » credit= »Louis Chauvin » align= »center » lightbox= »on » captionsrc= »custom » caption= »Morceau de l’affiche qui illustre l’alliance entre modernité et tradition » captionposition= »center » revealfx= »off » overlay_revealfx= »off »]

Du point de vue de la communication, force est de constater que le traditionnel a du cachet. Là encore, les méthodes plus classiques sont privilégiées. Un camion à mégaphones sillonne les communes avoisinantes pour avertir des représentations à venir et des flyers jonchent les pare-brise dans les parkings. Fredo Douchet insiste justement sur ce point : « C’est une culture, le cirque. Les gens ont l’habitude de ce folklore, avec la voiture sonore, les collages et les tracts. […] Sur Vertou, ça fait dix ans qu’on vient, et on s’aperçoit que le bouche à oreille est énorme. »

Des méthodes qui semblent porter leurs fruits, au vu du public qui vient avec plaisir, et qui bien souvent revient, se réjouit la direction. Le cirque Zavatta est attaché à la proximité avec les gens qui viennent le voir, et tient à le laisser transparaître, jusque dans les speechs de Monsieur Loyal, réalisés dans les gradins, au milieu des spectateurs. Bien entendu, tout cela prend forme en ayant à l’esprit de se placer au meilleur endroit possible : ni trop près des habitations pour éviter les nuisances en cas de rugissements nocturnes, ni trop loin des populations, d’où la proximité avec le Super U et a fortiori Nantes métropole.

[aesop_image img= »https://www.fragil.org/wp-content/uploads/2022/11/cracheur-de-feu-scaled.jpg » panorama= »off » imgwidth= »50% » credit= »Louis Chauvin » align= »center » lightbox= »on » captionsrc= »custom » caption= »Un numéro mixant le diabolo et la pyrotechnie » captionposition= »center » revealfx= »off » overlay_revealfx= »off »]

Le contexte veut que la situation du cirque en France est à ce jour compliquée, voire précaire. En témoigne l’opération escargot qui a eu lieu porte de Vincennes jeudi 24 novembre. Cette manifestation faisait suite à des arrêtés municipaux interdisant la station des chapiteaux sur leur territoire, mesure que les circassiens jugent hors-la-loi. Le directeur nous fait part de son opposition à ces arrêtés : « On voit ça comme de la discrimination, car ils empêchent les cirques : qu’ils soient avec ou sans animaux, ils ne les autorisent pas, de toute façon. […] Il y a des lois qui passent, et comme nous aimons nos animaux, on a proposé de faire des cirques en fixe. On nous dit que ça ne va pas non plus, que ça gêne. Donc il y a bien un souci quelque part. »

Le Cirque Nicolas Zavatta Douchet fête cette année les dix ans de sa présence sur le site de Vertou. Il va même jusqu’à prolonger la féerie jusqu’au 4 décembre prochain, fort de son succès auprès du public. Un public revenu en masse au spectacle vivant depuis que la Covid se fait moins virulente, au point de dépasser le niveau de remplissage d’avant pandémie, sur près de 350 spectacles étalés sur dix mois.

Avec une licence de lettres modernes en poche, j'ai intégré le CNJ depuis peu pour me former aux métiers du journalisme. Je suis féru d'art, en particulier de musique, de théâtre et de littérature, pans de la culture dont la métropole nantaise est justement remplie.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017