6 avril 2023

Fragil accompagne des collégien·nes à surmonter les difficultés de la création d’un média

À Montoir-de-Bretagne, entre janvier et mars 2023, la 3emeA du collège René Guy Cadou a été accompagnée par Fragil. En créant un média traitant des inégalités liées au genre dans leur collège, les élèves ont découvert la pratique du journalisme.

Fragil accompagne des collégien·nes à surmonter les difficultés de la création d’un média

06 Avr 2023

À Montoir-de-Bretagne, entre janvier et mars 2023, la 3emeA du collège René Guy Cadou a été accompagnée par Fragil. En créant un média traitant des inégalités liées au genre dans leur collège, les élèves ont découvert la pratique du journalisme.

« J’ai adoré travailler sur ce projet qui n’est pas dans le cadre des cours, c’est plus détendu, moins « stricte » que les cours normaux », témoigne une élève de la classe à l’issue de la séance de restitution qui conclut l’accompagnement de Fragil. Face à leur CPE et un AED venu·es spécialement pour cette heure de valorisation du compte Instagram @Tous_Humains, les élèves évoquent avec enthousiasme le travail réalisé lors des cinq séances qui ont précédé ce temps.

Entre janvier et mars, un salarié de l’association Fragil est venu animer ces séances de deux heures de découverte et de pratique du journalisme dans cette « classe média ». Financé par le conseil départementale, ce projet a permis aux élèves de se questionner sur la méthode journalistique, de comprendre les ressorts de fabrication d’une information, de créer un média sur une ligne éditoriale claire, les inégalités de genre au collège, et de produire des reportages pour enfin les publier sur un compte Instagram administré par l’ensemble de la classe.

Le travail en autonomie apprécié, malgré ses limites

La confiance accordée par l’animateur a été extrêmement appréciée par les élèves  : »interviewer en autonomie est une chose que j’ai beaucoup apprécié », confie une élève. Afin de réaliser leurs reportages, les élèves ont été invités à s’autonomiser pour organiser les temps d’interviews : identifier les personnes aptes à répondre à leurs questions, prendre rendez-vous et réaliser ces entretiens.  Cependant, de l’aveu d’un grand nombre d’entre elleux, les groupes ont souvent tardé à se mettre en action et admettent que leurs reportages ont manqué de diversité de témoignages : « l’investissement était moins présent vers la fin ».

Des reportages variés sur un thème qui divise

« C’est toujours le même sujet », « on l’a trop vu », des garçons ont exprimé leur lassitude vis à vis de la thématique choisie par leurs professeures pour le média que la classe a créé. Pourtant, cette thématique est au cœur de leur quotidien comme le regrette une personne de la classe : « les filles se sont moins imposées » dans le projet. De leur côté, quelques adolescentes ont apprécié la thématique qui leur a permis de « savoir ce que pensaient les profs ».

 

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La responsabilité des élèves mise à l’épreuve

Entre la cinquième séance et la restitution la responsabilisation des élèves a été mise à l’épreuve. Malgré la création et la signature d’une charte de bon usage du compte par les élèves elleux mêmes, la biographie du compte a été modifiée par un ou une élève de la classe sans l’accord de ses camarades. Cet événement a déclenché des temps de discussions en classe, pris en charge par le personnel éducatif (professeures, CPE, Principal) du collège. Comme dans toute organisation, la création de règles en commun ne garanti pas leur respect. Cependant, la classe a été touchée par ce « sabotage de compte » et le comportement de l’élève qui « a osé gâcher le projet » a permis au groupe de résoudre la situation et de montrer leur attachement au projet « malgré le manque de maturité de certains ».

Un projet qui motive

« On a appris énormément de choses sur le métier de journaliste et l’avons pratiqué », affirme un des élèves en analysant son parcours depuis le début du projet. Ce sentiment d’apprentissage de la méthode journalistique est partagé par plusieurs de ses camarades. Au delà de la fierté énoncée lors de la restitution et le sentiment d’avoir « bien travaillé », une élève est déçue que l’animateur « ne continue pas à venir faire des séances tout au long de l’année ». Mais même si l’accompagnement de Fragil s’arrête ici, le compte Tous Humains pourra continuer d’être alimenter par les élèves, si le cœur leur en dit.

 

Chargé de projets numériques et médiatiques chez Fragil depuis 2017, musicien, auteur, monteur... FX est un heureux touche-à-tout nantais. Il s'intéresse aux musiques saturées, à l'éducation aux médias, aux cultures alternatives et aux dystopies technologiques.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017