Dimanche 14 janvier, plus d’un millier de personnes bravèrent le froid mordant de ces derniers jours. L’appel national lancé par le collectif « marche des solidarités » il y a quelques jours, résonna jusqu’à Nantes. D’abord timide, la manifestation vit ses rangs grossir au fur et à mesure des prises de paroles. Les organisations de soutien s’étaient rejointes à l’initiative des collectifs de sans-papiers qui dénonçaient « la loi la plus régressive et la plus raciste depuis 40 ans ».
« On peut tout de même se réjouir d’une victoire idéologique du rassemblement national » s’enorgueillissait Marine le Pen, ne laissant aucun doute quant au caractère raciste et xénophobe du texte.
« On s’enfonce continuellement dans des lois racistes depuis quelques temps, ça devient un problème parce qu’on rentre dans une norme qui ne l’était pas il y a vingt ans. » s’inquiète Lancelot, présent dès le début de la manifestation. Les politiques et les médias s’échinent à avancer que l’immigration nous coûte de l’argent. Certes, mais en plus d’équilibrer les dépenses et de participer aux cotisations, l’immigration a plutôt tendance à rapporter à l’Etat selon les chiffres de l’OCDE (organisation de coopération et de développement économiques, ndlr)*.
Pas de parcours classique pour cette fois, la tête de cortège emprunte d’emblée la longue rue de Strasbourg pour rejoindre le croisement de 50 Otages. L’envie d’innover le parcours entraînera le mouvement vers Saint Nicolas, avant de s’engouffrer dans le passage Pommeraye plutôt que de continuer sagement vers Commerce. Les échos des chants et des slogans dans ce lieu mythique nantais donnent le sourire à l’ensemble des manifestant·es. « So-so-so, solidarité, avec les sans papiers, du monde entier » ou « de l’air, de l’air, ouvrez les frontières, la méditerranée est un cimetière », des paroles plus que d’actualité après que cinq jeunes adultes aient perdu la vie dans la nuit de samedi, au large des côtes du Pas-de-Calais.
Dans les rangs, des familles et des groupes d’ami·es qui ont fait le déplacement pour venir s’exprimer. « C’est un peu triste, depuis les lois retraites il y a vraiment moins de monde aux mobilisations, je comprends qu’avec tous les 49.3 qui passent on puisse avoir l’impression que ça ne sert à rien, mais si plus personne ne vient, c’est eux (le gouvernement, ndlr) qui auront gagné et sans une once de protestation » nous confie Gérard, retraité depuis peu, se réjouissant tout de même que le rassemblement soit festif et investi.
Remise en cause du droit du sol, conditions plus poussées pour les prestations sociales, déchéance de nationalité, durcissement du regroupement familial, caution financière pour les étudiant·es étranger·es, niveau de langue « A2 » requis, sont parmi les articles adoptés par le Parlement. « On fait tous partie d’une même espèce qui constitue l’humanité, on devrait tous s’entraider et encore plus pour les personnes qui ont vécus des situations catastrophiques comme la guerre, ce qui est l’exact contraire de la loi qu’ils veulent faire passer, c’est pour ça que je suis là, pour afficher mon désaccord » explique Charlotte.
La manifestation finira là où elle a commencé, au miroir d’eau. Un tramway sera joyeusement tagué, avant que chacun ne reparte de son côté.
La loi est actuellement en révision auprès du Conseil Constitutionnel après qu’une soixantaine de député·es l’ait saisi. Le 25 janvier, il statuera sur l’atteinte, ou non, aux droits et libertés fondamentales. « Espérons qu’il existe encore de l’humanité dans le cœur de nos politiques » souhaite Leïla. Le prochain rendez-vous est donné par les syndicats le 21 janvier pour tenter de faire porter leur voix une dernière fois.
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