27 mars 2024

La Trocquerie, un projet « Trocool » au cœur de Nantes

Trocool est un projet innovant, économique et écologique, implanté en plein cœur de la capitale des Pays de la Loire. Fragil est allé à la rencontre d’Agathe, sa fondatrice, pour qu’elle nous explique comment le projet est né, et comment il grandit auprès de ses clients.

La Trocquerie, un projet « Trocool » au cœur de Nantes

27 Mar 2024

Trocool est un projet innovant, économique et écologique, implanté en plein cœur de la capitale des Pays de la Loire. Fragil est allé à la rencontre d’Agathe, sa fondatrice, pour qu’elle nous explique comment le projet est né, et comment il grandit auprès de ses clients.

Ancienne chargée de communication dans des structures culturelles, Agathe connaît bien Nantes et son public. Le constat étant fait qu’elle (comme tout un chacun) avait chez elle une collection d’objets n’ayant ni sens ni utilité, et portée par sa volonté de créer un projet en accord avec ses valeurs, elle a réfléchi à une idée de projet de seconde main.

Agathe, créatrice de Trocool, à la Trocquerie

Mais il faut se le dire, Nantes regorge de boutiques de seconde main, fripes et brocantes, et elle souhaitait non seulement ne pas leur faire concurrence, être complémentaire, mais surtout aller encore plus loin dans la lutte contre la surconsommation. C’est alors qu’elle a eu ce « flash » de l’idée du troc : La Trocquerie était en train de naître.

« En ville ça ne sert à rien qu’on ait tous la même chose »

Inspirée par ce projet, et confortée par cette volonté de désindividualiser en quelque sorte nos manières de vivre, elle est passée par le parcours Pop Corn des Ecossolies, puis s’est mise à la recherche de son local, qu’elle a complètement réhabilité en effectuant les travaux elle-même. 2 mois après, la boutique ouvrait, en juin 2022 !

Une nouvelle économie sociale et solidaire

La Trocquerie, on y trouve à peu près tout type de produit que l’on peut trouver dans une maison, de la déco, des vêtements et accessoires adultes et enfants, du petit mobilier, de l’électronique, des jeux, des objets culturels comme des livres, CD, DVD, du bricolage, de la mercerie, papeterie, accessoires de sport… et on en passe !

Tout cela fonctionne avec un système d’abonnement : on peut essayer juste pour une journée, ou s’engager pour 1 mois ou 1 an.

Cet abonnement permet d’apporter des choses à la Trocquerie, et de se voir remettre en échange de chaque objet une gommette. Bleue ou rose pour des objets du quotidien qu’on a beaucoup, qui circulent facilement (vêtements, livres…), violette ou verte pour des objets qui ont plus de désirabilité comme du mobilier, des objets de déco vintage, ou encore de l’électronique.

Aucun calcul de prix n’y est fait : la gommette qui annonce la valeur de ce que l’on peut prendre dans la boutique en échange est uniquement basée sur l’attractivité du produit.

Les petits guides de la Trocquerie

Agathe n’accepte que des objets en état de marche, en bon état, qui peuvent avoir une nouvelle vie, et n’attendent que ça. « Par contre, je ne fais pas davantage de sélection : les goûts et les couleurs de chacun sont ainsi représentés dans la boutique ! » nous précise Agathe.

L’avantage des formules est d’autant plus intéressant pour celleux qui ont des abonnements longs : iels peuvent venir à la Trocquerie juste pour un emprunt au final, le temps qu’iels en ont besoin, par exemple : un appareil à raclette pour un diner, un déguisement pour une soirée entre ami·es, quelques livres pour enfants… Cela permet d’éviter d’acheter des objets qui ne serviront qu’une ou deux fois !

Côté vêtements et accessoires, Agathe privilégie toujours des éléments de saison, non seulement pour ne pas avoir trop de stock, mais surtout pour avoir un max de nouveautés utilisables de suite, pour vivre au fil des saisons. Idem pour les objets qui peuvent être saisonniers : les tapis, lumières et bougies se font plus nombreux en hiver qu’en été.

Au total, 25 000 objets ont été apportés dans la boutique en 1 an et demi.

Un public sensible à la seconde main, mais pas que

Les client·es d’Agathe sont plutôt varié·es. 1 gros tiers sont des gens du quartier, 1 autre gros tiers également viennent de tout Nantes, et pour le reste de Loire Atlantique, mais aussi des curieu·x·ses d’ailleurs.

« C’est très chouette d’observer les gens qui se croisent dans la boutique et se voient en vrai, reconnaissent leurs objets et sont contents de se retrouver, d’en parler. »

De la même manière, Agathe nous raconte qu’il arrive à des gens de reconnaitre leurs vêtements dans la rue, les objets ont une histoire qui lie les personnes.

Agathe nous partage aussi qu’« il y a des gens qui se donnent comme défi de ne faire que des cadeaux choisis dans la boutique » : le public qui vient à la Trocquerie est souvent déjà sensibilisé à la seconde main, qui permet d’avoir de nouvelles choses sans pour autant sur-consommer. Mais celle-ci n’a pas un avantage qu’écologique, mais aussi économique. « C’est un système qui permet d’avoir des objets en illimité pour pas cher », nous explique Agathe. Par exemple, les familles qui ont des enfants qui grandissent peuvent ainsi les équiper à moindre coût, choisir des vêtements, accessoires, jouets ou livres qui évoluent en même temps qu’eux.

Certains également peuvent laisser, à l’instar des cafés suspendus, des gommettes suspendues quand ils ne les utilisent pas. Cela permet à des gens qui ont moins les moyens de venir y choisir des objets dont ils ont besoin.

Enfin, la Trocquerie n’attire pas que des particuliers, certaines structures viennent aussi s’y fournir, comme le restaurant du coin qui a changé sa déco, ou des lycéens pour des évènements saisonniers.

Agathe aimerait aussi toucher davantage des photographes, profesionnel·les de l’évènementiel, troupes de théâtre, d’impros… qui commencent de plus en plus à connaitre et utiliser ce principe de troc, utile pour eux qui ont des besoins qui varient régulièrement.

La création de Trocool, l’association

Le projet a également pris un tournant il y a quelques mois avec la création de l’association Trocool. Désormais, toute personne qui entre dans la boutique est sensibilisée au réemploi, au troc, à la seconde main. Il est important pour Agathe que les gens comprennent que ce n’est pas un achat que l’on vient faire ici.

L’espace accessoires de la Trocquerie

Elle développe également toutes ces valeurs et nouvelles façons de consommer en dehors, et souhaite développer cette partie de sa mission, en allant au contact du public pour sensibiliser à la surconsommation et à tous les moyens pour y remédier.

L’association lui permet également de commencer à créer une communauté, avec le bureau de l’association mais aussi des bénévoles qui l’aident au rangement, aux tâches quotidiennes…

C’est aussi un coup de pouce financier pour ce projet à forte valeur ajoutée dans l’économie sociale et solidaire, via les adhésions, les dons qui sont désormais possibles, et la faculté à répondre à des appels à projets et demandes de subventions.

Infos pratiques

-Adresse : 23 rue Petite Biesse 44200 Nantes

-Site internet

Après un parcours de formation et un début de carrière l’ayant fait passer par Poitiers, Toulouse puis Paris, Sarah a déposé ses valises à Nantes depuis 5 ans. Entrepreneure en communication et événementiel, originaire d’Angoulême, elle apprécie beaucoup la capitale des Pays de la Loire et ne semble pas avoir dans l’idée d’en partir !

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017