Première librairie queer à Nantes, Les Vagues a fêté ses quatre mois d’ouverture en octobre. Amandine Heulard et Maxime Blanc, les gérant·es du lieu, nous parlent de leur vision devenue réalité.
Ouverte depuis mi-juin, la librairie Les Vagues, nom en hommage à un roman de Virginia Woolf, propose, outre un vaste choix d’ouvrages queers, des ateliers et rencontres in situ et hors les murs. Un parti pris important pour les jeunes libraires, car parler de littérature queer, c’est forcément parler de visibilité, comme le rappelle Amandine : « On cherche à prendre la place et c’est ce qu’on fait en ouvrant ce genre de lieu et c’est pour ça que c’était important de mettre ‘queer’ sur la façade, c’était une façon de dire ‘On est là' ».
« Désacraliser » l’accès aux librairies avec des ateliers
Dans une ville où il y a déjà « beaucoup de librairies », ce n’est pas anodin. Et qui dit accès à une librairie dit aussi désacraliser cet accès, un autre point important pour Amandine et Maxime qui voient en leurs ateliers une façon d’y parvenir : « C’est aussi ramener des personnes qui ne viennent pas dans un premier temps accéder à des livres mais pour faire du collage, pour écrire (…) ces ateliers-là marchent super bien, ce sont des petits groupes, ça crée un espace un peu cocon dans la librairie ». Ce sont aussi, par exemple, des lectures au bar queer La Plaisir, « Les Traversées », mises en place conjointement avant même l’ouverture de la librairie.
Au-delà d’un simple magasin de livres, c’est donc la volonté de proposer un lieu militant qui permet de se retrouver, ainsi qu’un espace d’ouverture : certaines personnes « ne sont pas forcément présentes dans les milieux militants et dans les évènements queers de Nantes, mais restent des personnes LGBT, et ces événements-là permettent de les rencontrer » nous précise Amandine, en ajoutant que « quand on met ‘Librairie Queer’, il faut être à la hauteur de ce qu’on a écrit sur notre devanture« .
Ces animations organisées pour échanger avec des écrivain·es queer servent ainsi à « désacraliser quelque part les auteurices qu’on peut adorer lire, pour pouvoir les rencontrer : ces personnes-là, elles sont ici et elles sont comme nous. Et c’est aussi donner la possibilité d’entendre l’échange sur des lectures avec du public ; ça marche et pour nous c’est trop important ».
Un lieu de rencontres et de convivialité
Multiplier les propositions, c’est multiplier l’accès à la littérature, à la réflexion, à l’échange. Car ceux qui passent la porte ne viennent pas là par hasard, souligne Maxime lorsque la question de l’accès et l’emplacement est évoquée : « C’est plus difficile de toucher les gens qui ne nous connaissent pas. C’est vrai que par rapport à une librairie de centre-ville où les gens se baladent, là l’emplacement pêche certainement un peu », étant donné sa devanture rue de Strasbourg, artère de la circulation routière nantaise.
Le duo a malgré tout voulu faire de cet espace un lieu accessible et convivial : ici on a le droit de parler fort, de faire du bruit, et de trinquer quand on fait des rencontres. Ils nous rappellent toutefois que « ce n’est pas suffisant » et que leur collaboration pour faire des ateliers avec d’autres lieux engagés comme Pol’n ou La Plaisir permet justement de proposer une nouvelle accessibilité et visibilité.
D’ailleurs, Amandine conclut en citant les paroles de la poétesse Meryem Alqamar, venue en octobre pour une rencontre « Lisez, écrivez écrivez écrivez, et lisez ». À ce sujet, les deux libraires conseillent quelques classiques de la littérature comme Stone Butch Blues de Leslie Feinberg, Le Corps lesbien et Les Guerrillères de Monique Wittig, La chambre de Giovanni de James Baldwin, ou encore Le Bal des folles et La Guerre de pédés de Copi.
Un article co-écrit par Claire Marquaille et Charlotte Gabrié