« Les inégalités n’attendent pas d’apparaître le jour où l’on devient majeur.es. » : Alors que le centre-ville de Nantes était occupé par le cortège de manifestation pour la journée internationale des Droits des Femmes, il était possible de retrouver les membres d’Iki Iki, association fondée en 2019 par Maryse Boyer et Ophélia Génot, au sein des locaux de Pol’n, quartier des Olivettes, à l’occasion de leur journée baptisée ‘Pour les droits des filles et des enfants aussi ». Une particularité : cet évènement était spécifiquement destiné aux enfants.

À l’occasion de la journée du 08 mars, IKI IKI organisait sa journée des droits des filles et des enfants aussi. ©IKI IKI
Prendre conscience que les discriminations surviennent tôt
Maryse Boyer, sexothérapeute et art-thérapeute, raconte qu’il y a un réel intérêt de faire se rencontrer ces deux pratiques sur le thème de la prévention des violences sexistes et sexuelles : « On souhaitait profiter de l’opportunité que représentait la Journée des Droits des Femmes pour se reposer la question de quand commencent les discriminations, et quand doit-on entamer l’éducation sur ce sujet ? Et on se rend compte que c’est dès l’enfance […] d’autant plus qu’après étude du terrain, c’est un thème très peu abordé, spécialement chez les moins de 14 ans. »
Inscrite dans une démarche d’éducation des enfants la plus tôt possible, cet évènement répond à un besoin de travailler sur le droits des filles, pour susciter une prise de conscience collective, et l’étirer jusqu’au droits des enfants au sens plus large.
Ce projet de festival initialement proposé par les deux salariées co-fondatrices l’année dernière, s’est fait emporter par l’équipe de bénévoles pour l’édition de 2025. Une évolution quant à son succès se fait également remarquer : des ateliers plus pleins, des effectifs plus importants, malgré la forte concurrence des différentes mobilisations et actions durant cette journée du 8 mars.

Plusieurs ateliers créatifs, de jeux, et de contes étaient organisés par les bénévoles d’IKI IKI, à destination des enfants présents à cette journée. ©Louise Pacaud
L’évènement était organisé en différents ateliers, organisés par tranches d’âges. Chez les 3-6 ans, l’objectif était de poser les bases des règles de sécurité sur les thèmes des émotions, de l’égalité des genres, d’adulte de confiance, etc… À partir de 6 ans jusqu’aux 9 ans, ces dernières notions sont renforcées et développées, et y est ajouté celle du consentement. Enfin, après 9 ans, une fois ces notions présumées solides, est discutée l’idée de stéréotypes et des discriminations. Globalement, l’objectif est de poser un cadre légal : « Le thème transversal de notre démarche, c’est celui des droits des enfants. Notamment le droit d’être protégé par les adultes, et donc le devoir des adultes de protéger les enfants. »
De l’amusement avant tout
Au delà de l’apprentissage, la co-fondatrice de l’association insiste sur l’importance que les ateliers proposés suscitent avant tout l’intérêt des jeunes. En plus des interventions réalisées directement en milieu scolaire, périscolaire et extrascolaire, une de leurs principales missions est de créer des outils à destination des enfants, pour qu’une fois associés à des séances préconçues et adaptées, ils puissent également être utilisés par des professionnels. Concrètement, ces outils prennent la forme de jeux de société, de contes ou d’ateliers créatifs, pensés avec un objectif principal : celle que les enfants s’amusent, afin de favoriser un meilleur intérêt au sujet abordé. Le 8 mars à Pol’n, on pouvait par exemple retrouver leur nouveau jeu « Ragnagnaaah » : un jeu de plateau inspiré du jeu de l’oie, à visée éducative sur le thème des menstruations, des moyens de contraception, et de l’anatomie.

Le collectif a créé un jeu de plateau, le « Ragnagnaaah », destiné à tous les enfants, sur le thème des règles, des protections hygiéniques, et de l’anatomie.
Des réticences peu importantes mais bruyantes
« Globalement les enfants sont plutôt réceptifs, surtout parce que les ateliers restent très ludiques, et que ça fonctionne. Ça favorise énormément les rencontres, ça permet à l’enfant de se sentir réellement à l’aise. » raconte la sexothérapeute et art-thérapeute. Sans pour autant être contraints de participer activement ou de parler, les enfants paraissent se sentir spontanément à l’aise et réactifs face à cette démarche pédagogique. Une confiance solide semble même se construire : « Ils ont l’air très intéressés par le fait de découvrir qu’il existe des droits des enfants. Et ça c’est une des moments les plus importants de la séance. Ils se sentent considérés. »
Du côté des parents, en dehors de la journée du 8 mars durant laquelle on retrouve uniquement des profils positionnés en faveur de l’éducation positive, nombre d’entre eux ne rencontrent jamais les salarié•es de l’association. Pour les quelques un•es avec lesquel•les les salarié•es de l’association ont l’opportunité d’échanger, plusieurs avis se distinguent : « ceux plus réfractaires, minoritaires mais bruyants ; ceux qui sont un peu plus frileux, mais qui posent des questions ; et enfin ceux qui sont au contraire très enthousiastes, et qui nous accueillent avec beaucoup de joie ». À ce propos, Maryse Boyer ajoute : « Notre objectif n’est pas d’être que sur des événements en entre-soi. Même s’ils restent important car ils emportent le sujet, ça donne des enfants qu’on rencontre en classe et qui sont déjà très informés, très riches dans leurs débats et plus attentifs aux autres. »
Le constat est qu’une fois l’intervention en milieu scolaire réalisée, les parents plus réfractaires se font plus silencieux : « La réalité est que pendant nos séances il ne se passent pas les choses qu’ils craignent […] Ils sont plus bruyants qu’ils ne sont nombreux, et leurs sources viennent d’organisations généralement assez douteuses. »
Quel que soit le sujet, il semble impossible à Maryse Boyer d’atteindre une approbation absolue. Une chose est sûre, autour de ces types de thématiques, et spécialement du sujet des droits de l’enfance, il y a beaucoup de peurs : « Rien que d’informer des enfants qu’ils ont des droits, et que les adultes n’ont pas tous les droits, c’est déjà un sujet qui pose problème auprès de beaucoup d’adultes » .