Pour ce premier rendez-vous à Trempolino, Get Up !, en partenariat avec Prun’, a organisé une conférence rassemblant Emmanuel Maizeret, dit Daddy Reggae, la réalisatrice et activiste dub Nathalie Valet, ainsi que des membres du sound system nantais RDH Hifi. Une exposition composée de photographies de Sébastien Carayol et de peintures de l’artiste Sil Cunningham embellit les murs de la salle. Pour les plus curieux, RDH Electronics a mis en place un panneau didactique qui nous montre en temps réel le fonctionnement basique d’un Sound System. Pas loin d’une centaine de personnes remplit la salle, en quête d’informations et d’anecdotes. Le public est surtout jeune, mais reste bien hétérogène. Pour l’anecdote, on n’aperçoit vraiment très peu de dreadlocks, contrairement à l’image standard que certains pourraient avoir en tête.
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Métissage à la Jamaïque
Comme toujours, et afin de mieux comprendre le pourquoi de l’existence d’une culture, il faut revenir en arrière dans l’histoire. Face à un manque de salles festives et à de nombreuses personnes n’ayant pas accès à la radio, les sound systems sont nés dans les années 50 en Jamaïque. Conçus au départ comme une sorte de discothèque ou de soirée itinérante, ces rassemblements, qui permettent aux gens de danser et d’échanger, connaissent un succès extrêmement populaire. Mouvement qui rappelle sans doute les block parties américaines, où la figure du DJ avec sa collection de 45-tours joue un rôle primordial. Et c’est précisément et en partie grâce à cette connexion avec les État-Unis et ses bases militaires, que les premiers vinyles de jazz, soul ou rythm and blues vont atterrir et tourner sur les platines de cette île des Caraïbes. Ces sons venus d’ailleurs vont très vite se mélanger, et modifier pour toujours les musiques traditionnelles antillaises. La créativité des musiciens jamaïcains, unie à cette influence étrangère, donne lieu à de nouveaux styles comme le ska, le rock steady et même le reggae.
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Les années qui suivent seront d’une importance notoire pour l’histoire de la musique : le rythme de production de tunes s’intensifie. Une vraie compétition s’installe entre les divers sound-systems des quartiers de Kingston, qui cherchent à posséder les meilleurs vinyles locaux et d’outre-mer ou à offrir un volume toujours plus puissant que les autres. Des maisons de disques sont créées et l’industrie se spécialise…
Un succès par accident
Mais ce sera par accident que le dub va finalement entrer en scène en 1967. Le DJ Rudy Redwood, qui fait partie du sound-systemSupreme Ruler of Sound balance le premier morceau de reggae en version instrumentale sur une piste de danse. Il manque en fait à cette version la partie vocale, en raison d’une erreur de gravure du disque-test en acétate ou dubplate. L’auteur de cette anecdote, c’est le fameux King Tubby, qui à l’époque travaillait comme ingénieur du son chez le label Treasure Isle. À la surprise de tous, le succès est immense du côté du public. Mais cet épisode marque aussi une époque dans l’industrie : King Tubby sera tout de suite employé par les producteurs de reggae, en réalisant les versions instrumentales des morceaux pour la face B des 45-tours des groupes locaux. La coupe de pistes, ainsi que des effets comme la réverbération, l’écho, ou le phaser vont définir ce style musical, et seront largement étudiés et modifiés par Tubby lui-même et Lee « Scratch » Perry entre autres.
Pour montrer l’ampleur et la richesse de cette culture, le modérateur Philip Papayatik s’appuie au cours de la soirée sur quelques morceaux du documentaire Dub Stories.
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Ce travail, sorti en 2006 et signé Nathalie Valet, présente lors de la conférence, est disponible aujourd’hui en intégralité sur Youtube (ne vous inquiétez pas, elle est bien contente du fait que son documentaire soit en ligne et de façon gratuite). Malgré certains points de divergence, tous les acteurs qui sont réunis ce soir-là sont d’accord sur un point : pour réussir dans ce milieu, il faut l’aimer. Il faut, sans doute, être engagé et passionné jusqu’au bout.
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La fin de cette soirée se déroule à l’extérieur de Trempolino, dans le plus pur style jamaïcain de l’époque avec le Truck System d’Emmanuel Maizeret. Les gens dansent dans une ambiance bon enfant au rythme des classiques du root reggae, du ska, du rock steady, du dub…
Pour réécouter la conférence, c’est par ici.
Pour les plus passionnés, l’association Gep Up ! propose une autre date à ne pas louper : la Fête de la Musique le mardi 21 juin, avec Musically Mad Sound System + Zion Gate Hi-Fi.
Texte : Xoel Freire
Photos : David Gallard / Clack pour Trempolino