En ce lundi d’octobre, un des salariés de l’association Fragil s’est rendu à l’institution Anjorrant, dans le quartier du Grand T rue du Général Buat, pour y animer un atelier axé sur les réseaux sociaux. Les participantes motivées par le sujet qui se sont présentées pour prendre part aux activités et aux débats sont des jeunes mamans adolescentes hébergées par l’institution qui travaille pour leur protection, leur émancipation et leur insertion. Délimitation et utilisation des réseaux sociaux, publicités sur les plateformes, stockage des données étaient autant de sujets abordés lors de ces discussions qui, comme le confieront des participantes à la fin de l’atelier, ont appris beaucoup de choses aux jeunes filles.
Définir un réseau social
Après une première prise de contact, pendant laquelle toutes les personnes, y compris l’animateur et la volontaire en service civique, se sont présentées en faisant part de son prénom, son âge et son réseau social de prédilection (sondage duquel Snapchat est sorti grand gagnant, avant même Instagram), la première activité a commencé. Avec des cartes où figurent des logos globalement très connus du grand public, les jeunes filles ont eu à les classer de la façon qui leur semblait la plus appropriée. Rapidement, et avec une aisance assez frappante pour certaines participantes, les critères ont été déterminés et, malgré quelques hésitations, les grandes catégories sont apparues : réseaux sociaux, navigateurs, moteurs de recherche et plateformes de catalogues en ligne (musique et vidéo) ont été réunis selon ces critères aux quatre coins de la petite table basse. Ce premier « jeu » a permis d’aborder la question de la définition d’un réseau social (qui, à la différence d’une plateforme de vidéo, par exemple, est fondé sur les interactions et les réactions, comme l’ont déduit les participantes), mais aussi celle du cyberharcèlement. Cette dernière a été amenée naturellement par les remarques et interventions de certaines jeunes qui ont immédiatement parler des gens « méchants » et « mauvais » sur Tiktok, avec une discussion autour des événements liés au récent « trend » du hashtag #anti2010, qui avait conduit à des insultes, menaces et actes violents à l’égard des nouveaux arrivés en 6ème en cette rentrée 2021. Une des jeunes filles a confié avoir été particulièrement touchée par ce sujet, ayant elle-même une petite sœur née en 2010, et l’animateur de Fragil en a profité pour rappeler l’importance de ne pas faire porter la responsabilité aux victimes de harcèlement, ainsi que quelques pistes pour avoir les bons réflexes si l’on est témoins de harcèlement. Avant de passer à l’activité suivante, l’éducatrice, l’animateur et même la volontaire service civique ont été rappelés à la vérité de leur âge : ils sont vieux, puisqu’ils ne sont pas sur Tiktok…
Les réseaux sociaux : gratuits… vraiment ?
Pour aborder le thème du modèle économique des réseaux sociaux (comment se fait-il qu’on ne paie jamais pour un réseau social, alors qu’il était évident pour toutes les participantes que les applications telles que Instagram, Facebook, Tiktok ou même Whatsapp génèrent beaucoup d’argent?), une discussion entre les participantes et animateurs a amené à la construction collaborative d’un schéma imageant les sources de revenus de ces sites. Les jeunes filles ont donc déduit par leurs interventions respectives que, dans le monde des réseaux sociaux, ce sont les utilisateurs qui sont le produit, tandis que les marques et entreprises sont les clientes de ces plateformes. Plusieurs réactions ont montré à quel point les jeunes filles sont frappées par les publicités ciblées, allant jusqu’à les dénoncer comme du harcèlement.
Après un débat mouvant et quelques discussions, la thématique suivante a été abordée : la stockage et l’attention à porter au partage de nos données. Là aussi, un schéma a été progressivement construit, montrant les intermédiaires de stockage entre un émetteur et un récepteur d’une photo sur Snapchat, la possibilité de conservation par le réseau de cette photo et la menace que peut poser le hacking ou piratage de ces données directement sur des serveurs dont les participantes n’imaginaient pas l’existence. « ça fait peur », résume l’une d’entre elles à la fin de cette activité.
Derrière la photo
Enfin, pour clôturer l’atelier, les participantes se sont prises au jeu d’une mini enquête « comme un agent du FBI », à partir d’un unique post fictif sur Instagram, avec comme unique source d’information la photo, la description du post, un commentaire et la bio du profil à l’origine du post. Là encore, les jeunes filles prenant une part très active dans l’atelier ont été largement surprises par l’étendue des informations que l’on peut déduire du partage d’une simple photo de sushis… Les jeunes mamans ont admis avoir appris beaucoup de choses, et avoir pris conscience de nombreuses réalités des réseaux sociaux. La conclusion de l’une d’entre elles, au moment de débriefer des deux heures passées ensemble, en est là encore fortement révélatrice: « c’est effrayant ».