24 avril 2023

À Orvault, des ados forgent leurs amitiés en créant un média d’actualités locales

Du 17 au 21 avril, une petite quinzaine de jeunes orvaltais·es était encadrée par l'association Fragil dans le cadre d'un stage de découverte du journalisme. Les adolescent·es ont vécu cinq après-midi riches en découvertes humaines.

À Orvault, des ados forgent leurs amitiés en créant un média d’actualités locales

24 Avr 2023

Du 17 au 21 avril, une petite quinzaine de jeunes orvaltais·es était encadrée par l'association Fragil dans le cadre d'un stage de découverte du journalisme. Les adolescent·es ont vécu cinq après-midi riches en découvertes humaines.

« J’ai apprécié rencontrer des gens, apprendre des choses sur eux et me faire de nouveaux amis », ce sont les mots de conclusion choisis par l’un·e des participant·es à une semaine de stage d’initiation au journalisme organisée à Orvault. Un sentiment très largement partagé par la petite quinzaine de jeunes qui ont découvert les ficelles de la création de l’information pendant les cinq premiers jours des vacances de printemps 2023. Réunie tous les après-midis de 14h à 17h à l’accueil jeunes du bourg d’Orvault, cette bande d’ados a été encadré par un des salarié·es de l’association d’éducation aux médias Fragil. Au programme : initiation à l’écriture journalistique, réflexion autour du concept de ligne éditoriale, création d’un média sur Instagram et réalisation de reportages, le tout dans une ambiance détendue mais sérieuse.

L’animateur de Fragil accompagne un groupe

« Ils font quoi à côté ? »

Sollicitée depuis plusieurs années consécutives par le point Info Jeunes d’Orvault pour l’animation de ce type de stage, Fragil a cette année proposé un cadre un peu différent pour les jeunes inscrit·es. Là où les éditions précédentes (le stylo, le nouvel envol d’Orvault, dnonc.dphandre.1000it …) visait à ce que chaque groupe d’ados produise un seul « gros » reportage dans sa semaine de stage, l’accent a cette fois été mis sur un rythme de production plus soutenu. De plus, la ligne éditoriale choisie, à savoir « Orvault bourg, cette semaine » a permis à l’animateur de maximiser les chances de disponibilités des sources à interroger, en minimisant les temps de trajets et les temps d’organisation logistiques qui apparaissaient lorsqu’il fallait emmener un groupe interroger une source à 5 km du lieu de stage.

Le tableau de suivi des reportages en salle de rédaction

Ce format « urgent » a permis aux jeunes de passer plus rapidement à l’action et de se voir progresser de reportages en reportages. On a même pu voir l’émergence de réflexes journalistiques : traversant un groupe d’adultes installant des jeux de société dans la salle attenante à celle du stage, Isaac lance au groupe « ils font quoi à côté ? », l’animateur en profitera pour le questionner « qu’est ce que tu peux faire pour le savoir ? », sans hésiter, l’ado répondra « je vais leur demander et voir si ça peut faire un article ».

 

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Un stage productif qui favorise les rencontres

« Au début ça me faisait un peu peur, mais au final j’ai adoré et ça me donne envie de recommencer », témoigne Chloé qui a su se dépasser, accompagnée par un groupe bienveillant. Au bout des cinq après-midi, elle aura participé à quatre des seize reportages publiés par le compte Instagram « Cet Arbre Là« , se définissant comme « le média des ados journalistes qui présentent l’actualité d’Orvault cette semaine ». Au fil de la semaine, les jeunes ont interviewé des habitant·es d’Orvault, des commerçant·es, des bibliothécaires, la police municipale, le personnel de la Mairie… autant de rencontres qui leur ont permis d’apprendre « des choses sur les gens » et de parfois lutter contre les a priori et la timidité.

Les jeunes à la rencontre des Orvaltais·es

Les rencontres se sont aussi faites à l’intérieur du groupe. Grâce à plusieurs jeux « brise-glace » organisés par l’animateur, mais aussi à travers l’autonomie laissée aux ados dans l’organisation de leur reportages et des temps de goûter, les jeunes ont pu forger de nouvelles amitiés. Les participant·es sont nombreux·ses à avoir apprécié « l’ambiance de groupe », « discuter avec des gens motivés », « participer en groupe », »faire connaissance avec les gens du stage », ou plus simplement « se faire plein d’amis ». Un engouement général qui se traduit par la volonté verbalisée de continuer le projet autour de ce média par  plus de la moitié des jeunes présent·es.

Les ados apprennent à se connaître à travers un « brise-glace ».

Une restitution valorisante

« J’ai appris des choses que je ne savais pas sur ce qui se passe Orvault » témoigne une mère d’ado présente au temps de restitution publique organisée lors de à la fin du stage. Avec cette seule phrase, les ados ont pu apprécier l’utilité de créer de l’information locale, et donner du sens à la création du média Cet Arbre Là. « On a rencontré Marie, une retraitée trop mignonne en faisant un reportage sur la maison de retraite, ça nous a donné envie de raconter son histoire », explique Ninon et Rose face à une petite dizaine de parents, frères et sœurs. À travers ce bilan public, les jeunes stagiaires ont pu raconter les histoires derrières les reportages, et donner des pistes d’auto-critiques qui ont prouver à l’assemblée à quel point ils et elles ont pris ce stage de journalisme au sérieux. Gageons qu’il aura donné le goût de la recherche, de la vérification et de la diffusion de l’information à la majorité des participant·es.

Une restitution valorisante à la fin du stage

 

Chargé de projets numériques et médiatiques chez Fragil depuis 2017, musicien, auteur, monteur... FX est un heureux touche-à-tout nantais. Il s'intéresse aux musiques saturées, à l'éducation aux médias, aux cultures alternatives et aux dystopies technologiques.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017