Neige est très attachée à son grand-père algérien, Émir. La mort de ce dernier va révéler une famille dysfonctionnelle et déclencher chez elle une véritable quête d’identité qui se traduira par une recherche obstinée de ses origines.
ADN apporte son lot d’émotions : il émeut, il fait rire, il agace. Le film se découpe en deux parties. La première traite du grand-père et de sa mort, la seconde de la quête d’identité acharnée de Neige, le personnage principal. Il rejoint la trame, assez classique au cinéma, d’une famille qui se déchire et règle ses comptes alors qu’un événement vient bouleverser son fonctionnement habituel. À l’instar de films comme le très récent Blackbird de Roger Michell (2020), Je vais bien, ne t’en fais pas de Philippe Lioret (2006) ou encore Deux jours à tuer de Jean Becker (2008). Le film de ce dernier L’été meurtrier, sorti en 1983, avait d’ailleurs révélé Maïwenn à l’âge de sept ans. Elle avait ensuite elle-même exploré ce thème avec son premier film Pardonnez-moi en 2005.
Faire famille
Du côté des interprètes, Louis Garrel dans le rôle de l’ex-compagnon de Neige vient contrebalancer la dimension dramatique du récit par un humour mordant qu’il débite avec une spontanéité désarmante. Fanny Ardant brille en mère toxique malgré un jeu parfois un peu excessif. Dans les bonnes surprises du casting, Dylan Robert, jeune acteur découvert dans le remarquable Shéhérazade en 2018. Il se révèle crispant parfois, attendrissant souvent dans son rôle de jeune meurtri et indocile, il est impressionnant de naturel. Maïwenn mène son film avec le personnage de Neige, pour qui il est parfois difficile de ressentir de la sympathie. L’expression de sa douleur peut être agaçante, mais reste à l’image du réel. L’utilisation ponctuelle d’une caméra subjective bouscule la narration assez classique du film. La gestion du deuil est personnelle et le film le montre bien. Il questionne ce qui fait famille, ce qui réunit ces individus. Tout est sujet à controverse : de la manière de gérer la douleur au choix du cercueil ou de la cérémonie. Le spectateur semble parachuté dans cette famille. L’origine de ces tensions est peu évoquée, il le devine au gré de remarques parfois acerbes, parfois tendres. Maïwenn assume « ne pas supporter d’entendre une « musique de cinéma » », que l’histoire soit racontée de manière artificielle, et préfère à cela que le spectateur se sente « comme en train d’écouter à travers une porte ». Il doit donc accepter de ne pas posséder toutes les clefs du récit. Le film parvient à réunir tous ces personnages pour le portrait d’une famille éclectique. Finalement, il tient de la tranche de vie.
Chercher ses racines
Si la famille est au cœur du récit, la question de l’identité en constitue le corollaire. Le deuil soudain pousse Neige dans ses retranchements et révèle qu’à la trentaine, elle ne sait pas réellement qui elle est et surtout d’où elle vient. La force du film repose sur le questionnement autour de ce qu’est être immigré et notamment de la troisième génération. Neige se tourne vers un apprentissage obsessionnel de l’histoire de l’Algérie dans l’espoir de panser ses blessures. La caméra s’immisce dans son quotidien mais sans jamais en révéler les contours. Subsiste une impression de ne pas pouvoir cerner le personnage et de ne pas toujours comprendre ses choix. Il est alors difficile d’être réellement ému par les difficultés qu’elle rencontre. Maïwenn refuse l’étiquette d’ « autobiographie » pour qualifier ADN, mais avoue avoir elle-même été dans cette quête identitaire avant de le tourner. Le voyage vers l’Algérie, dans sa vie comme dans le film, a marqué une étape importante dans ce processus : un retour aux sources.
ADN
Réalisation : Maïwenn
Scénario : Maïwenn – Mathieu Demy
Image : Sylvestre Dedise – Benjamin Groussain
Musique : Stephen Warbeck
Nationalité : Français
Durée : 1h30
Avec : Maïwenn, Fanny Ardant, Louis Garrel, Dylan Robert, Marine Vacth, Caroline Chaniolleau…