Cinq ans. Près de cinq années à résister. Tout est parti d’une révolution pacifiste contre l’autoritarisme, d’un soulèvement populaire réclamant plus de démocratie, dans la lignée des mouvements des Printemps arabes. Cette rébellion qu’on a voulu faire taire. Qu’on a voulu faire taire en utilisant la violence, la répression, les balles de plomb. Les bras ballants ils sont restés, ou au mieux parfois les bras croisés, sans broncher. Enfin si, des discours condamnant ces « actes de cruauté », ils ont su en faire… des tas, des tonnes, des caisses. Ils, ce sont ces politiques, l’ONU, la communauté internationale, les institutions étatiques. Se tourner les pouces, se renvoyer la balle, en attendant qu’elle explose dans les paumes de celui qui sera désigné plus tard comme « responsable », puisqu’il en faut toujours un. Mais ce sang, qui coule sur Alep, nous l’avons tous sur les mains. On attend, en actualisant le fil d’actualité de nos réseaux sociaux, que les mauvaises nouvelles tombent une par une, voyeurisme morbide. Sentiment d’impuissance. Une « libération » exercée par l’écrasement inconditionnel de l’insurrection. Une « libération » exercée par le massacre de la population civile. Hommes, femmes, enfants. Certains n’ont connu que la guerre, le chaos, l’horreur au prix des ego. Jean-Marc Ayrault a déclaré dans un communiqué le 13 décembre : « Les soutiens du régime, à commencer par la Russie, ne peuvent pas laisser faire et admettre cette logique de vengeance et de terreur systématique sans prendre le risque d’en être complices. » Maintenant que le point de non-retour est atteint, les accusations et dénonciations vont bon train. Le temps des regrets, aussi. A défaut d’avoir « trop tardé [à agir] sur le plan politique », on éteint la Tour Eiffel en guise de « solidarité »… ou par simple moyen de se déculpabiliser. Complices nous aussi ? Une dizaine de tentatives de réécriture plus tard, on a tenté de trouver une « bonne fin » à cet édito mais il n’en existe pas. Si seulement nous pouvions… réparer les vivants.
Aurélie Clement, décembre 2016