«Il était temps que ça recommence» souffle Serge Belaud, le Président du Sud Loire Carnaval, un retraité bénévole qui construit des chars depuis 1979. «Ces chars, on les a conçus en 2020. Ça fait 2 ans qu’ils attendent de sortir. On commençait à trouver le temps long» ajoute-t-il.
Créer des chars nouveaux chaque année, les inventer, les imaginer. Voilà ce qui motive tous ces carnavaliers qui consacrent 2 à 3 jours par semaine ou leur week-end à cette activité. Ils sont bricoleurs, peintres, décorateurs et ils aiment se retrouver pour construire ensemble un char éphémère.
«On tourne en rond si l’on ne se renouvelle pas. Au bout d’un an, on a envie de changer. Ce qui nous intéresse, c’est de créer. Un char, ça doit rester éphémère» fait remarquer Serge Belaud.
La motivation en question
Ces 2 dernières années, la Covid a mis à mal leur motivation. Beaucoup sont partis pour vaquer à d’autres occupations : la marche, le jardinage ou les boules.
«On sent bien que l’ambiance n’est plus la même» reconnaît Daniel Bregeon, un ancien de la revue de la Cloche qui fait 80 km aller-retour à ses frais pour venir donner un coup de main à ses copains. «Il n’y a plus la même osmose» poursuit-il.
«Les jeunes ne veulent plus s’engager dans la durée. Et il n’y a pas que chez nous. Dans le sport, c’est pareil» constate Jacques Amathieu, le président du comité des fêtes de Doulon avant de conclure : «La pandémie a cassé l’élan dans le monde des associations. Ça va être dur de relancer la machine».
Signe que ces 2 ans sans carnaval a perturbé tous ces bénévoles. Quand, on leur demande comment s’appellent leurs chars, ils ne s’en souviennent plus. Et ils ont du mal à retrouver tous les morceaux qu’ils avaient mis de côté.
Défiler à tout prix
«En 2020, le coup d’arrêt a été un choc. En 2021, on a encore accepté de rester à la maison car avec les jauges, il n’y aurait eu personne aux défilés. Mais maintenant, il ne faudrait pas qu’on annule tout au dernier moment» lâche Bernard Bouet, un vieux de la vieille : conducteur de char depuis 35 ans, roi du carnaval en 2013 et fidèle de l’équipe les Can’ailles.
Ce n’est pas la première fois que Nantes est privé de carnaval. Il y a eu le douloureux épisode de 2011. Un déficit de 400 000 euros dans la caisse avait conduit à un bras de fer avec la mairie et à un changement d’organisateur. Mais l’année d’après en 2012, il n’y avait jamais eu autant de monde dans la rue pour voir les chars défiler.
Redonner de la joie
Daniel Dupouet s’en souvient, lui qui fabrique les grosses têtes en papier mâché depuis 35 ans, un fidèle parmi les fidèles qui a pris la suite de son père au carnaval.
«En 2012, c’était de la folie. On n’avait jamais été autant médiatisés. D’ailleurs j’ai été interviewé sur RTL sans m’en rendre compte». Et de s’interroger sur la répétition de ce succès : «Cette année, ce n’est pas pareil. Le contexte se prête moins à la fête».
En tout cas, tous ont à cœur de redonner un peu de joie aux nantaises et aux nantais, aux grands comme aux petits.
«Ce carnaval, c’est l’une des rares fêtes populaires qui ne coûte rien et qui se passe dans la rue» estime le père des grosses têtes, Daniel Dupouet.
«Du moment qu’on voit les yeux des spectateurs briller à notre passage, on est content. On se dit que l’on n’a pas fait tout ça pour rien» rajoute Jacques Amathieu.