19 décembre 2024

Ateliers Pause Radio à Jet FM, entre empowerment et sororité

Du 2 au 6 décembre 2024, l'association JET a proposé son programme de remobilisation professionnelle par la radio, à destination des femmes, dans ses locaux du quartier Nantes Bellevue.

Ateliers Pause Radio à Jet FM, entre empowerment et sororité

19 Déc 2024

Du 2 au 6 décembre 2024, l'association JET a proposé son programme de remobilisation professionnelle par la radio, à destination des femmes, dans ses locaux du quartier Nantes Bellevue.

Entre une tasse de thé et une part de gâteau, les paroles se délient. C’est le moment d’un premier bilan, sur leur semaine d’ateliers “Pause Radio” à JET, pour les 4 participantes et leur animatrice Laure Rodier.
Cela fait 8 ans que l’association JET porte ce projet à raison de 3 sessions par an. Pour la deuxième année consécutive, l’équipe a proposé, en supplément des sessions en mixité, une session d’ateliers “Pause radio” dédiée uniquement aux femmes, en ce mois de décembre, sur la thématique « Tisser du lien et de la solidarité entre femmes sur le territoire Nantais ».

Faire du journalisme inclusif

« À JET, il y a l’activité d’antenne, il y a l’activité d’ateliers de pédagogie (SonoLab) et après, on a une sorte de répertoire d’artistes-auteurs nantais et amis de JET (SonoDoc), avec qui on élabore des choses autour de la création sonore. », explique Laure Rodier, coordinatrice au sein du pôle d’actions socio culturelles et d’éducation aux médias et à l’information de l’association.

“Pause Radio” est un programme d’ateliers de remobilisation socio-professionnel. C’est un des projets du SonoLab qui porte chaque année une cinquantaine de projets (éducation aux médias et à l’information (EMI) en établissements scolaires, actions d’éducation artistique et culturelle (EAC), ateliers de remobilisation, …). À l’origine, mis en place par la journaliste Alexandra Jore à son arrivée à JET il y a 8 ans, “Pause Radio” s’appelait “Radio Métiers”. Depuis, le concept du programme a évolué de chantier d’insertion à remobilisation afin d’être plus ouvert et trouver son public.

Laure Rodier en plein échange avec deux des participantes. 06/12/2024

Tisser du lien entre femmes

Le lien, c’était justement le thème de cette session en non-mixité, totalement construite par Laure Rodier. « Tisser du lien avec les fils ; les fils comme la trame d’un récit, les fils d’un enregistreur et d’un micro, les fils de brodeuse, les fils de rencontres… », énumère-t-elle.

Laure Rodier raconte : « Je suis arrivée à JET il y a 10 ans en tant que bénévole et, très vite, j’ai monté une émission féministe avec des collègues de la radio qui s’appelait “les détricoteuses” ».
Pour concevoir cette session de “Pause radio”, elle s’est inspirée de découvertes locales « où la couture, la broderie, le crochet, étaient employés comme un outil d’empowerment dans les milieux féministes ». Parmi ses découvertes, l’association “les Simones”, mais aussi le projet “Fil de Loire” porté par Claudine Paque et Roselyne Le Saux, et présenté en atelier. Un projet et moment partagé qui ont également ému Emie, l’une des participantes. À 22 ans, elle est en réflexion sur son projet pro suite à des contraintes de santé. Cela permet d’« oser des nouvelles choses », grâce au Contrat d’Engagement Jeune (CEJ) proposé par la mission locale.

« Avec Pause Radio, on essaie de ramener des femmes éloignées de l’emploi dans un tissu social, un maillage qui ne soit pas que professionnel, qui soit aussi de sororité. », souligne Laure.

Un bilan positif

« On a eu des échanges avec des femmes qui venaient de tout horizon […]. Il y a une forme d’ouverture des parcours. », confie Mathilde, 22 ans, ravie d’avoir pu interviewer une femme ayant une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH), lors d’une session « TouteSport ! » organisée par le CIDFF 44.

Pour Cynthia, cette maman de 40 ans d’origine américaine, pour qui il est encore difficile « de se constituer un réseau pro en tant qu’étrangère », “Pause Radio” c’est aussi « les rencontres avec les autres femmes de l’atelier […]. Il y a un esprit d’équipe qui s’installe qui est hyper beau ». Sur son temps libre, elle fait partie d’une chorale. « Ce qui m’intéressait dans cet atelier, c’était de travailler la voix autrement. »

Pour Cynthia, Emie, Mathilde et Claire, les 4 participantes rencontrées à la fin de leur session, le bilan de la semaine est positif. 06/12/2024

« Il n’y a pas forcément d’enjeu. On est là parce qu’on l’a choisi. », précise Claire, la quarantaine, en reconversion professionnelle. Venue à “Pause radio” pour se challenger et gagner confiance en elle, elle reviendra à Jet FM en tant que bénévole. L’expérience l’aidera à développer son projet de podcast.

Comme Claire, des vocations naissent parfois, c’est le cas de Nathalie, une participante de l’an dernier « qui s’intéressait beaucoup à l’interculturalité, et là qui vient de créer une asso dans laquelle elle utilise l’outil radio puisqu’elle fait des séances d’écoute. », se réjouit Laure Rodier.

Un paysage associatif en transformation

L’avenir de la radio est incertain depuis la confirmation, cette semaine, de la perte totale de son aide au fonctionnement de la Région (12 000 €). « Ça fait encore une double peine, car le département est en déficit. Déjà en 2025 on n’aura quasi plus de financement du département », confie Laure Rodier.
Déjà menacée à l’automne par une baisse du fonds de soutien à l’expression radiophonique locale (voir l’article de Fragil), et sachant que l’année 2025 serait difficile, l’association JET s’était déjà restructurée en passant de 7 à 5 salarié·es pour 2025. «  À JET on se bat et on sait que l’on a des projets qui ont de la valeur. On rebondit.» Le programme reste soutenu par la contrat de ville, Nantes métropole, la ville de Saint-Herblain, la CAF et le département de Loire atlantique.

“D’une réaction radicale découle des tas de réactions radicales.»

« Ce qui est catastrophique ce n’est pas tant notre réduction de subvention, c’est le fait que tous nos partenaires soient affectés et donc ça fait une réaction domino. » Des collaborations et projets déjà engagés sont menacés, comme les ateliers d’éducation artistique et culturelle pour le Pannonica, qui ont purement et simplement été annulés. Une perte de 4 000 € pour un projet « que l’on bossait depuis 6 mois ensemble et que l’on avait commencé. », se désole Laure.

L’association JET a lancé une campagne de don pour la soutenir et permettre de maintenir l’essentiel de ses activités et emplois.

 

Lien utiles


Les productions de la dernière session Pause Radio seront à retrouver en ligne à partir de mi-janvier sur le site dédié.

Tout droit arrivée de Paris où elle a vécu les 15 dernières années, Amandine est à Nantes depuis seulement quelques mois. Pourtant, sa connaissance du calendrier culturel et son ancrage dans le quartier révèlent plutôt une femme capable de trouver toutes les occasions pour faire des rencontres et de s’imprégner de l'imaginaire nantais.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017