« C’était nécessaire d’en parler » témoigne un des élèves, visiblement ému, à la sortie de l’atelier de sensibilisation auquel il vient de participer. Ce 27 mai, à la demande de leur professeure d’éducation socio-culturelle, ce sont trois classes de secondes du lycée agricole Olivier Guichard qui ont chacune participé à un temps de deux heures, encadré par l’équipe de l’association Fragil.
Une sensibilisation en trois actes
Pendant le temps de deux heures dédié à la réflexion autour de la problématique du cyber-harcèlement, chaque groupe d’une douzaine d’élèves a pu vivre un déroulé similaire. Après une mise en garde nécessaire de l’animateur quant aux risques de réveiller des émotions fortes chez les élèves, le sujet étant potentiellement au cœur de leur quotidien ou de leur histoire personnelle, la réflexion a pu débuter dans un cadre ou la bienveillance et l’écoute de l’autre étaient au cœur des échanges.
S’appuyant sur un jeu de classement d’étiquettes réalisé en trinôme, les élèves ont pu débattre entre eux de leur perception du harcèlement, du cyber-harcèlement, des moyens de lutte connus ou méconnus (plateforme netecoute.fr, article de loi définissant les peines encourues par les personnes harceleuses…). Ce temps a aussi permis aux élèves d’échanger autour de certaines définitions liées aux pratiques de cyber-harcèlement, notamment celle du « revenge porn », pratique consistant à publier des photos ou vidéos intimes de son ex en « vengeance » d’une fin de relation.
Dans un second temps, les élèves de chaque classe ont été invités à se positionner lors de débats-mouvants. Ce type de débat s’appuyant sur des techniques d’éducation populaire permet de laisser de la place aux opinions de chaque participant ou participante. « Il faudrait surveiller les personnes victimes afin qu’elles ne deviennent pas harceleuses à leur tour », « il est simple de parler de harcèlement à un adulte » ou encore « il vaut mieux faire attention à ce que l’on dit et fait en ligne pour ne pas se faire cyber-harceler »… telles ont été les phrases qui ont été mises au débat pour permettre aux élèves de donner leur opinion et d’argumenter sur les risques liés à la culpabilisation des victimes, à la difficulté de se faire entendre lorsqu’on subit du harcèlement, et sur les solutions faussement simples à apporter dans les cas de cyber-harcèlement.
Ces deux activités passées, Fragil a proposé aux élèves de conclure par un temps d’écoute d’un témoignage fort. Accompagnant Fragil quotidiennement depuis huit mois à travers son volontariat en service civique, Paloma, jeune femme de 17 ans a décidé de raconter son histoire à chacun des groupes. Malgré le silence pesant qui concluait sa prise de parole, les élèves se sont montrés reconnaissants d’avoir eu le courage de partager avec elles et eux les harcèlements qui l’ont conduite à quitter le système scolaire. « C’était important de rappeler le rôle de chacun dans le harcèlement, y compris celui du témoin » commentera Tifenn, élève de seconde. Émotion visible dans chacun des groupes, prise de parole spontanée d’élèves victimes et questions concernant l’impact du harcèlement sur sa vie, telles ont été les réactions des groupes, soulignant la nécessité de telles actions auprès d’un public bien plus touché qu’il n’y paraît. Pour Maxence qui a participé à l’atelier du matin, le « témoignage a été très fort en émotion » et a permis de faire « réfléchir sur les actes des uns et des autres ». Un atelier utile car il apporte « du soutien auprès de ceux qui ont vécu ça » souligne Maëlys, lycéenne. Cette utilité sera d’ailleurs ressentie par Paloma quelques jours plus tard. Le fait de témoigner a été une occasion pour elle de se dépasser et de retrouver de la confiance en elle : « Je me sens fière de moi d’avoir réussi à parler de mon histoire, je ne pensais pas y arriver. »
Une « expérience à renouveler »
« Je trouve que les interventions de Fragil sont d’une grande qualité et dynamique. » C’est ce que commentera, suite aux ateliers, Florence Saffroy, qui avait sollicité l’intervention de Fragil au lycée agricole Olivier Guichard. Soulignant l’utilité des temps dédiés au cyber-harcèlement, la professeure d’éducation socio-culturelle admet que « les réactions très émotives des élèves par rapport au thème […] parlent d’elles-mêmes et montrent l’importance de parler du sujet ». Une « expérience à renouveler » dans ce lycée, peut-être dès la rentrée prochaine.