16 janvier 2024

Citad’elles, faire reprendre le pouvoir aux femmes

Ouvert en 2019 sur l’île de Nantes, ce lieu d'accueil pour les femmes est à l'initiative de la Ville de Nantes, en lien avec des associations (le Planning Familial, SOlidarité femmeS Loire-Atlantique, SOS Inceste…). Aujourd’hui, il accueille tout type de femmes, victimes de tout type de violences sexistes et sexuelles et leurs enfants.

Citad’elles, faire reprendre le pouvoir aux femmes

16 Jan 2024

Ouvert en 2019 sur l’île de Nantes, ce lieu d'accueil pour les femmes est à l'initiative de la Ville de Nantes, en lien avec des associations (le Planning Familial, SOlidarité femmeS Loire-Atlantique, SOS Inceste…). Aujourd’hui, il accueille tout type de femmes, victimes de tout type de violences sexistes et sexuelles et leurs enfants.

« Vous êtes légitimes à venir ici ». Voilà ce qu’explique Caroline Godard, responsable de Citad’elles, en s’adressant aux nantaises victimes de violence. La honte n’a pas de raison d’exister quand il s’agit de violences sexistes et sexuelles (VSS). Depuis, un mois et demi à la suite de la journée de lutte contre les VSS, la ville de Nantes voit apparaitre nombre d’affichages spécifiques, en plus des permanents, faisant la promotion de « Citad’elles ». Ce lieu d’accueil, ouvert en continu pour les femmes, cherche à devenir un endroit où chacune peut trouver l’accompagnement adapté. 

 « Je ne suis pas là pour sauver, je suis là pour accompagner, pour être un levier »

Selon Caroline Godard, la question posée dès la création du projet est « le centre idéal c’est quoi ? ». C’est « un centre pluridisciplinaire qui est ouvert 24/24 et 7/7 qui accueille toutes les femmes victimes de tous les types de violences {…} avec leurs enfants, qui peut faire de la mise en sécurité, qui garantit la confidentialité ». Une mission qui apparait réussie, face à l’effort donné dans la création d’un lieu ressource qui accueille en moyenne 1000 nouvelles femmes par an et qui tente de garantir un espace sain pour les professionnel·les qui font face à « une densité émotionnelle » importante. 

Des professionnel·les qui doivent savoir accepter la temporalité de chaque femme arrivante, faire en sorte qu’elles soient actrices de leur propre parcours. « Ce sont elles qui doivent trouver la réponse. Sinon on ne vient pas combattre le schéma d’emprise qui a été mis en place. On vient juste le renforcer et l’idée c’est vraiment de leur redonner de la capacité à agir ici. Il y a vraiment cette question d’empowerment. », clarifie la responsable du lieu. 

Légitimer toutes les victimes

Malgré tout, il reste des difficultés qu’il faut contourner ou bien faire avec. Caroline Godard évoque deux grands enjeux, celui d’« une situation sociétale actuelle complexe et {…} tout un secteur qui peut être en tension », au sujet des secteurs sociaux et médico-sociaux, empêchant parfois le meilleur accueil pour ces femmes dans des structures telles que le CHU. Et celui d’« une diversification des violences ou en tout cas une mise en exergue de certaines violences », qui ne sont pas encore légitimées par la société pouvant démotiver des femmes à recevoir des soins.

Il s’agit alors pour ce lieu d’accueil des femmes victimes de violences de continuer à développer des soins et des accompagnements adaptés à chaque femme. La responsable de Citad’elles espère « que les femmes se sentent légitimes {…} à venir dans un lieu comme ça même si vous avez subi une violence sexuelle, une agression dans la rue, un manager violent ou un collègue violent. Vous dites ‘’bah ouais, en fait, je suis légitime à venir ici parce qu’en fait je suis une femme et j’ai vécu des violences’’ ».

Lien utile :

Citad’elles

Autodidacte et impliquée, Lisa est en deuxième année de licence information/communication. Dans le quotidien, elle est très active et trouve épanouissement dans l’artistique. Son lien aux autres et son rapport à l’art lui créent de grandes ambitions pour l’avenir.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017