Face à une dégradation continue de l’offre de soins en psychiatrie, les syndicats CGT CHU et Sud CHU appelaient à dénoncer « la mort programmée de la psychiatrie publique ». Professionnel·les de santé et citoyen·nes se sont rassemblé·es mardi 28 janvier à l’heure du déjeuner place Royale, pour alerter sur la situation critique des services psychiatriques, tant pour les adultes que pour les enfants.
Une mobilisation à la fois professionnelle et citoyenne
Pauline N., travailleuse sociale, et Alban W., éducateur spécialisé, participaient au rassemblement pour alerter sur les conséquences directes des fermetures de lits sur leur dispositif, Un chez soi d’abord, qui accompagne des personnes durablement sans abri et souffrant de troubles psychiques sévères. « Quand une personne décompense et qu’elle ne peut pas accéder à une hospitalisation rapidement, c’est une atteinte à son bien-être, ça participe à une errance médicale […] les urgences sont embolisées, les parcours de soin se délient, et on fait face à des personnes qui vont très mal », expliquent-ils.
Au-delà de leur mission professionnelle, Pauline et Alban insistent : « en tant que professionnel et en tant que citoyen ça nous mobilise ». C’est également ce qui a motivé Alain Gripoix, retraité venu soutenir les syndicats : « ma famille, mes amis, tout le monde peut être concerné. Moi, je vais bien, alors autant mettre mon énergie au service de ceux qui se battent pour protéger ce secteur. ».
Des soins en suspens
Antoinette Durand, infirmière et secrétaire du syndicat SUD, dénonce une situation alarmante : « Actuellement, pour obtenir un rendez-vous de psychothérapie, il faut attendre six mois. C’est beaucoup trop long pour des personnes déjà en grande détresse. » Elle décrit également les difficultés à accéder à des consultations psychiatriques, essentielles pour mettre en place des traitements adaptés : « Même le secteur libéral est saturé. Les délais d’attente ne sont pas raisonnables, et cela impacte directement la santé mentale des patients. »
Aux urgences psychiatriques, la tension est palpable. Marina S., infirmière à Saint-Nazaire, témoigne : « On garde des patients en box pendant trois ou quatre jours, faute de places disponibles en hospitalisation. Pendant ce temps, d’autres patients continuent d’affluer. Il faut gérer la violence, il faut gérer la frustration, c’est compliqué ». Leur unité de pédopsychiatrie, SHado, qui permettait de soulager les effectifs de Nantes a fermé ses portes en 2023, faute d’un nombre suffisant de psychiatres. L’état du secteur dédié aux plus jeunes est catastrophique. Avec seulement quatorze lits pour enfants et adolescent·es dans le département, les professionnel·les sont contraint·es de « renvoyer des jeunes en grande détresse dans des situations précaires« . Faute de place, 82 enfants ont du être hospitalisés en 2020 à Saint-Jacques avec des adultes, en 2024, ce chiffre est passé à 159.
Entre des délais d’attente interminables – jusqu’à six mois pour une simple consultation – et des urgences saturées, chaque étape du parcours de soin devient un combat. À Nantes comme ailleurs, les acteur·rices de la psychiatrie appellent à une prise de conscience collective pour éviter un effondrement total du système. L’état a fait de la santé mentale la Grande cause nationale de 2025, faible lueur d’espoir pour les soignant·es qui espèrent « davantage de moyens, davantage de personnel, et surtout davantage d’humanité« .