Jeudi 6 juin, le cinéma Le Concorde organisait une séance de ciné-débat du film-documentaire « Des goûts de lutte » en présence des réalisateurices Emmanuelle Reungoat & Pierre-Olivier Gaumin. Dans la salle, une centaine de personnes de tout âges s’est déplacée pour assister à la projection. Analysés par l’historienne Ludivine Bantigny et la sociologue Héloïse Nez, on y découvrira les parcours de vies croisés de gilets jaunes à la suite de cette révolte extraordinaire.
« En passant par l’intime et par les parcours collectifs, le film questionne jusqu’où les luttes sociales peuvent nous transformer et se faire émancipatrices. »
Emmanuelle Reungoat est sociologue et originaire de Nantes, « elle voulait montrer le film dans son fief » comme nous raconte Pierre Olivier Gaumin qui lui est réalisateur militant. « On fait l’acte politique d’aller voir des petites salles de ciné, parce que c’est facile de le montrer dans des amphis avec cinq spécialistes déjà au courant, l’idée c’était d’aller vers un public alternatif curieux du mouvement des gilets jaunes » nous explique-t-il.
« C’était important pour nous d’organiser ce débat sur un film qui montre que la lutte peut être émancipatrice » rappelle la représentante du syndicat de la magistrature. La projection était organisée de manière collective avec les réalisateurices du film, la CGT Nantes Métropole, le syndicat des avocats de France et le syndicat de la magistrature. Les bénéfices de la projection revenaient au collectif COLERE, qui regroupe une vingtaine d’organisations associatives, syndicales et politiques, qui lutte contre la construction du plus gros CRA (centre de rétention administratif, ndlr) de France métropolitaine à Nantes.
« Le cinéma se parle, il se débat »
« Je me suis surtout intéressée à des primo contestataires, c’est-à-dire des gens qui n’avaient jamais fait de manifestations avant, qui n’avait jamais participer à un mouvement de contestation, c’est un peu comme ça qu’on les a choisis » explique la réalisatrice pour répondre à la question sur le choix des protagonistes qu’une jeune femme venait de poser, « une fois qu’on les avait choisis, on avait plus le choix de reculer, on a filmé en faisant le pari qu’il allait se passer quelque chose pour ces gens. ».
Un homme d’une quarantaine d’années s’interroge sur l’absence de violences policières dans le documentaire, pourtant très présente lors du mouvement. Les réalisateurices l’expliquent par le petit échantillon des personnes filmées. Pierre Huriet, avocat bien connu à Nantes, notamment pour avoir défendu des gilets jaunes victimes de ces violences, prend la parole « ce qui m’a marqué dans le documentaire c’est l’expression de naïveté des protagonistes, et cette naïveté a été terrible dans la confiance qu’avaient ces personnes dans les forces de l’ordre, dans le fait que l’on soit en France, pays des droits de l’Homme, et qui s’est fait fracasser à coup de flashball ».
Patrick est venu seul, » je n’ai pas fait parti du mouvement mais comme on a entendu tout et son contraire, qu’ils (les gilets jaunes, ndlr) étaient d’extrême gauche, puis d’extrême droite, au final on ne savait plus quoi penser alors venir voir des documentaires ça me permet de me faire une idée plus clair« , même si il est conscient que le film n’était qu’un échantillon des personnes qui composaient le mouvement, il s’est rendu compte de la pluralité des militants qui y ont participé.
Une tournée nationale est actuellement en cours et arrivera à la capitale début juillet.