28 février 2023

Deux après-midis pour s’initier au journalisme avec le pôle jeunesse de Saint-Herblain

Les 20 et 21 février derniers, l’équipe du pôle jeunesse de Saint-Herblain accueillait Fragil pour encadrer des jeunes lors d'un stage de découverte du journalisme. Entre initiation, débats et pratique, les trois ados ont pu mieux comprendre le rôle des journalistes.

Deux après-midis pour s’initier au journalisme avec le pôle jeunesse de Saint-Herblain

28 Fév 2023

Les 20 et 21 février derniers, l’équipe du pôle jeunesse de Saint-Herblain accueillait Fragil pour encadrer des jeunes lors d'un stage de découverte du journalisme. Entre initiation, débats et pratique, les trois ados ont pu mieux comprendre le rôle des journalistes.

« Ce stage m’a confirmé mon métier de prédilection« . Ravie, Alicia, 15 ans a passé deux après-midis à s’initier au journalisme en compagnie de Kayliam, 15 ans, et Raphaël, 14 ans. Accueilli·es au premier étage du Carré des Services de Saint-Herblain, les ados s’étaient inscrit·e·s de manière volontaire à ce stage gratuit proposé par le Point Ressources Jeunesse de la ville. Encadré·e·s par François-Xavier Josset, chargé de projets médiatiques pour l’association d’éducation aux médias Fragil, les ados ont pu passer six heures ludiques, mais studieuses, autour de la thématique de la création d’information.

Un temps pour s’initier et débattre

Le premier après-midi est dédié à la réflexion autour de la création d’information. Les jeunes sont invité·e·s à découvrir la méthode journalistique à travers plusieurs ateliers ludiques : écriture journalistique, reportage photo, réalisation de mini-interviews. La première qualité d’un·e journaliste ? « Il faut être curieux« , répondra Alicia après avoir participé aux différents exercices.

Pour compléter ce temps de réflexion, un débat mouvant est organisé par l’animateur sur la thématique du journalisme. « Il faudrait un document officiel pour être journaliste », « Les journalistes ne devraient pas donner leur opinion », « Pour les journalistes, il devrait être plus important de parler de 10 morts à 10km que de 100 morts à 1000km »… autant de questions qui bousculent un peu les ados et qui les amènent à réfléchir aux notions de ligne éditoriale, de hiérarchisation de l’information, ou encore de la définition même de ce qu’est un·e journaliste. Un moment très apprécié de Raphaël qui a « appris plein de choses », notamment à travers ces échanges avec ses camarades.

Initiation à l’interview.

Une rencontre inattendue avec une journaliste qui s’ignore

En fin d’après-midi, une surprise a donné corps à la réflexion menée jusque là : une correspondante locale de Presse-Océan s’est jointe au groupe pour réaliser un article sur l’atelier. Surprenante entrée en matière, elle se présente en affirmant « Moi je ne suis pas journaliste, je n’ai pas de diplôme« . Saisissant l’occasion au vol, et reprenant certains arguments déjà avancés par les jeunes lors des débats, l’animateur a pu questionner cette fausse idée. En effet, il n’est pas nécessaire d’avoir un diplôme pour être journaliste. De plus, les CLP (correspondant·es locaux/locales de presse), dont le rôle est de rechercher, vérifier et diffuser des informations, pratiquent en faisant cela…du journalisme. N’en déplaise aux journalistes professionnel·les qui ont parfois un peu oublié que ce n’est ni le salaire, ni la demande d’une carte de presse qui en font des journalistes, mais bien la pratique du journalisme.

Les ados en plein reportage sur le café des habitants du Carré des Services

Un temps pour pratiquer

Pour le second après-midi de stage, l’animateur a invité les trois ados à se lancer dans une création de média en 3h seulement. Du choix de la ligne éditoriale, à la première publication en passant par le choix des sujets traités, et le choix du nom du média, tout a été décidé par cette jeune équipe de journalistes. Pour la ligne éditoriale, ce sera « le carré des services, cette semaine ». Un choix qui permettra de toujours coller à l’actualité du lieu. Pour le nom, reprenant l’apprentissage de la veille, Kayliam proposera « Le Curieux de Service« . Un jeu de mot malin collant avec le nom du lieu, validé sans hésitation par ses deux acolytes. Concernant les sujets, les idées fusent. « L’atelier de journalisme », « le restaurant solidaire », « les activités proposées », « le ressenti des usagers »… après quelques minutes passées à réfléchir aux meilleures personnes à interroger pour couvrir chacun des sujets, les trois ados sont partis en reportage dans le bâtiment. Armé·e·s de leurs smartphones et surpassant leur timidité, les jeunes journalistes récoltent en moins d’une heure de quoi réaliser quatre reportages vidéos aux angles bien définis. Pris par le temps, ils et elle n’auront malheureusement le temps de ne monter qu’une seule interview avant la fin de la journée, mais tous et toute repartent avec l’idée en tête qu’il leur est possible de créer leur propre média pour y publier leur propres reportages dès que l’envie leur viendra.

Chargé de projets numériques et médiatiques chez Fragil depuis 2017, musicien, auteur, monteur... FX est un heureux touche-à-tout nantais. Il s'intéresse aux musiques saturées, à l'éducation aux médias, aux cultures alternatives et aux dystopies technologiques.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017