C’est entre deux clichés du photojournaliste Reza que Fragil rencontre Tara. Celle-ci est née pendant la guerre Iran-Irak et a quitté l’Iran en 2011. Juste avant notre entretien, Rahmat nous rejoint. D' »une différente génération » que Tara nous dit-il en rigolant, il a quitté l’Iran en 1983. Au sein du collectif « Femme Vie Liberté », ils organisent des manifestations depuis le 2 octobre 2022 (date de création du collectif) en soutien au peuple iranien. Ce collectif veut “porter la voix des gens à l’intérieur du pays”.
C’est donc dans le contexte particulier de la mort du président iranien Ebrahim Raïssi, ou « le boucher de Téhéran », que notre rédaction est allée recueillir leur témoignage. Un surnom qu’il doit à son implication dans les massacres des opposants du régime. Il fut notamment responsable de l’exécution de milliers de prisonniers en 1989, une « année noire pour l’Iran » nous dit Tara en précisant « qu’il faisait partie du comité de la mort » en tant que juge. “Certains allaient même finir leur condamnations” explique Rahmat avant d’ajouter qu’un ordre du guide suprême Khomeyni fauchât la vie de ces milliers de détenus.
À propos de Raïssi, Rahmat développe : “Il était le représentant des factions les plus extrémistes et ultra conservatrice du régime”. Président en 2021, il avait été élu au terme « d’une des élections les plus pourries de l’histoire de l’Iran” poursuit-il. À titre de comparaison, “C’est comme si Adolf Eichmann était le président de l’Allemagne« .
Avec la mort de celui qui était pressenti comme le prochain guide suprême, nos deux interlocuteurs restent mitigés sur la suite des événements. “Ce qui est sûr c’est que les gens sont contents” nous dit Tara à propos du crash d’hélicoptère, à l’origine de la mort du “boucher de Téhéran”. Un crash entraînant des scènes de joie et de célébration comme on en voit rarement dans les rues iraniennes.
Cependant, pour Tara, cette situation ne doit pas être prise pour acquise. “C’est temporaire… J’aurais aimé que l’opposition s’organise et utilise cette occasion”. “Le premier jour et le deuxième jour les gens étaient dans les rues pour danser mais il ne se passe rien” continue Rahmat, en évoquant le rappeur iranien Toomaj Salehi, toujours condamné à mort. “J’espère qu’ils ne vont pas profiter de l’occasion pour le tuer.” “J’ai trop peur” ajoute Tara.
Malgré tout, les deux membres de Femmes Vie Libertés Nantes gardent espoir : “Ça bouge un peu et un jour ça [le régime actuel] va tomber … Ils ne sont pas aussi solides qu’ils le croient… C’est pourquoi on est optimiste”.
Le 30 mai, dernier jour de l’exposition, une conférence animée par l’expert Tierry Corville, sur la situation géopolitique iranienne se tiendra à Cosmopolis. L’occasion d’en apprendre plus sur la situation actuelle de l’ancienne Perse et de pourquoi pas faire un don au collectif nantais.