25 septembre 2018

Jeter l’encre gare maritime

Jusqu'au 25 octobre 2018*, l'espace Simone de Beauvoir, situé quai Ernest Renaud à l'arrêt de tram Gare Maritime, accueille l'exposition de Marie Marchand, peintre-sculptrice, sobrement intitulée « Encre et Terre »: des corps suggérés et sublimés grâce à de l'encre de Chine fabriquée maison, ou à de l'argile "engobée", y sont donnés à voir... Rencontre à supplément d'âme.

Jeter l’encre gare maritime

25 Sep 2018

Jusqu'au 25 octobre 2018*, l'espace Simone de Beauvoir, situé quai Ernest Renaud à l'arrêt de tram Gare Maritime, accueille l'exposition de Marie Marchand, peintre-sculptrice, sobrement intitulée « Encre et Terre »: des corps suggérés et sublimés grâce à de l'encre de Chine fabriquée maison, ou à de l'argile "engobée", y sont donnés à voir... Rencontre à supplément d'âme.

Une forêt de têtes d’hommes trône au centre de l’espace. Ce sont les « déracinés » de Marie, qui, faisant écho à l’actualité, trouvent leur source d’inspiration dans… les arbres! « J’ai besoin de traiter le vivant, d’être en lien avec le cosmos », explique-t-elle.

Ses dessins, ses peintures, elle ne sait comment les définir, sont pour la plupart des nus féminins, réalisés en 4 minutes d’après modèle, et dont le flou des lignes, des taches, et l’équilibre entre pleins et déliés les font osciller entre le figuratif, l’abstrait et la calligraphie. « C’est une forme d’écriture: j’essaie de rendre ce qui se passe entre mon modèle, une danseuse, et moi pendant ces quatre minutes de pose. Elle dégage, je reçois beaucoup, je capte le mouvement, ou pas. »

[aesop_image imgwidth= »60% » img= »https://www.fragil.org/wp-content/uploads/2018/09/dessinencreMarieMarchand.jpg » credit= »Marie Marchand » align= »center » lightbox= »on » caption= »Dessin à l’encre de Marie Marchand » captionposition= »center » revealfx= »off » overlay_revealfx= »off »]

Toutes les créations exposées ici forment une série avec une histoire. Marie, cheveux courts, binocles bicolores noir/moutarde assorties à sa tenue et bijoux imposants, souhaiterait qu’on en déduise que « rien n’est perdu. »

Elle fabrique également des carnets en papier cartonné, des « livres pauvres » (ébauches recyclées), des pochettes poétiques. Les tarifs s’étendent de 10 à 380 euros.

3 questions à Marie Marchand

Fragil : A votre avis, naît-on artiste ou le devient-on?
Marie Marchand : Je crois que tout le monde a un certain talent et que si on le travaille, ça peut donner quelque chose. On peut aussi passer à côté…

« …un heureux hasard… »

Fragil : Exposer dans un lieu dédié au féminisme, était-ce un parti pris?
Marie Marchand : C’est un hasard mais un heureux hasard… D’ailleurs il n’y a pas de hasard. C’est cohérent avec qui je suis. J’ai longtemps évolué dans un milieu professionnel masculin très technique qui m’a apporté de la rigueur dans ma pratique artistique. En revanche, je pense que le combat féministe continue et qu’il faut veiller à ce que tout ne parte pas en vrille.

« Je travaille le vivant »

Fragil : Vos sujets de prédilection sont des hommes et des femmes, nus sur papier kraft ou des bustes à l’état brut: le minimalisme comme moyen d’accéder à l’universel?
Marie Marchand : Je ne pense pas en ces termes. Voyager au Japon m’a beaucoup influencée en ce sens que mon rapport émotionnel à la matière tient aussi du spirituel. Je travaille le vivant.

*Puis sur rdv dans son atelier à Couëron ou sur mariemarchand.blogspot.com

Espace Simone de Beauvoir

Journaliste/correctrice/traductrice/blogueuse/heureuse maman, je redécouvre Nantes à travers le regard de mon fils né en Afrique, après avoir passé 3 ans à Londres à officier sur des fashion websites, puis 9 ans à Casablanca à œuvrer dans la presse généraliste aux rubriques mode, tendances, culture, lifestyle... Je me suis reconvertie dans la presse de proximité depuis...

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017