• Kay Zevallos Villegas, performance et exposition à la Zoo Galerie
2 avril 2024

KAY, la femme et les légendes péruviennes à la Zoo Galerie

KAY, c’est Kay Zevallos Villegas, une artiste péruvienne pluridisciplinaire qui est à la fois performeuse, metteuse en scène et plasticienne. Après avoir incarné le mythe de la tortue « charapa » lors du vernissage, elle laisse derrière elle une exposition à voir jusqu’au 4 mai au centre d’art contemporain, Zoo Galerie à Nantes.

KAY, la femme et les légendes péruviennes à la Zoo Galerie

02 Avr 2024

KAY, c’est Kay Zevallos Villegas, une artiste péruvienne pluridisciplinaire qui est à la fois performeuse, metteuse en scène et plasticienne. Après avoir incarné le mythe de la tortue « charapa » lors du vernissage, elle laisse derrière elle une exposition à voir jusqu’au 4 mai au centre d’art contemporain, Zoo Galerie à Nantes.

KAY est une jeune artiste péruvienne, elle a grandi à Iquitos, une métropole de 380 000 habitants en pleine Amazonie. Cette grande ville l’a marquée par sa situation géographique, on ne peut y accéder que par le fleuve ou par les airs, et aussi par toute l’histoire qui s’y rattache. Issue du métissage, Kay Zevallos Villegas revendique autant son ancrage dans la modernité en portant la voix de l’écoféminisme que son enracinement dans les légendes traditionnelles. KAY est une artiste touche à tout, ainsi son imaginaire prend forme aussi bien en photos, qu’en films, sculptures, performances et installations. Le centre d’art contemporain, Zoo Galerie nous offre l’opportunité de découvrir cette artiste internationale.

3 mythes animistes pour porter un autres regard sur les femmes

 

Charapa - KAY (photographies 2024)

Charapa, 2024. Photographies, impression jet d’encre pigmentaire, cadre aluminium noir mat, cornes naturelles et perles (photo © C Cornu)

Cosmogoniste militante, KAY n’hésite pas à reprendre l’image de charapa callente, la tortue ardente. À l’origine, la tortue est symbole de fertilité dans les croyances autochtones, mais cela se transforme et devient un stéréotype associé à la femme amazonienne, facile et hypersexualisée. C’est ainsi que lors de la performance donnée lors du vernissage, elle revêt la structure d’une carapace. Puis quasiment crucifiée dans l’ossature métallique, elle termine par un discours engagé où il est question de renverser la société actuelle fictivement amalgamée à l’abondance et à la paix.

Kay aswan… [Sois plus fort·e…], 2024

Kay aswan… [Sois plus fort·e…], 2024 – Installation. Paraffine, pigments naturels (achiote, curcuma, poudre de coca), pigments industriels, divers objets, céramiques. (photo © C Cornu)

Autre récit cosmogonique la lune, la luna, corps céleste relié très intimement aux femmes, à leur corps, à leur cycle et à leurs orifices. Elle se retrouve dans la forme d’une table circulaire exposée à une lumière très blanche sur laquelle repose 28 talons hybridés à des éléments naturels (arrêtes, papillons, plantes, champignons…) qui prennent les couleurs de plus en plus sombres. La lune est aussi présente à l’entrée de l’exposition sous forme de sable rose, par endroit mélangé à des perles et de la poudre de coca, qui évoque une vulve géante.

KAY - LUNA-YUBE, 2024.Peinture murale, acrylique et peinture fluo.

KAY – LUNA-YUBE, 2024. Peinture murale, acrylique et peinture fluo. (photo © C Cornu)

Elle travaille aussi autour du mythe du dauphin rose, le bufeo colorado, animal sacré pour les peuples amazoniens. Avec l’arrivée des colons, notamment au 19e siècle pour l’exploitation à outrance du caoutchouc, le bufeo colorado devient la représentation en fait d’une figure paternelle pour les enfants qui ont une ascendance inconnue ; c’est-à-dire des enfants qui sont nés de liaisons extra-conjugales, de viols, d’agressions sexuelles. Puis peu à peu, il se met à incarner un homme très occidental, un grand blanc aux yeux bleus honorant de sa visite les jeunes femmes. Elle revisite alors le mythe pour mieux s’en libérer.

KAY sanstitre (©Orianne Jouanny)

KAY – Sans titre, 2024. Sérigraphies sur latex, cordes en coton et latex (photo © Orianne-Jouanny)

Tout au long de l’exposition, KAY n’hésite pas à jouer avec les clichés d’animalité sexuelle, mais elle les utilise pour mieux les combattre.

Cette exposition monographique « Del Coño Sur » de Kay Zevallos Villegas alias KAY est à découvrir jusqu’au samedi 4 mai 2024, du mardi au samedi de 14h00 à 19h00, au centre d’art contemporain, Zoo Galerie, 12 rue Lamoricière à Nantes (entrée libre et gratuite).

Nantaise de cœur, Caroline sillonne la ville entre concerts et spectacles. Ses autres domaines de prédilection : l'art contemporain, les arts graphiques et le cinéma ! Elle partage avec plaisir ses coups de cœur culturels.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017