• La Nuit de l'Erdre 2018
5 juillet 2018

La Nuit de l’Erdre 2018 : un 20ème anniversaire réussi !

Pour son vingtième anniversaire, La Nuit de l'Erdre a mis les mis les petits plats dans les grands. Retour sur l'ambiance de la première soirée du festival et sur les concerts d'Ultra Vomit, The Hives, Møme et Justice.

La Nuit de l’Erdre 2018 : un 20ème anniversaire réussi !

05 Juil 2018

Pour son vingtième anniversaire, La Nuit de l'Erdre a mis les mis les petits plats dans les grands. Retour sur l'ambiance de la première soirée du festival et sur les concerts d'Ultra Vomit, The Hives, Møme et Justice.

Un ballon estampillé “La Nuit de L’Erdre” flotte dans un ciel encore clair. Dès l’entrée du festival, l’ambiance est familiale, les bénévoles courtois, la circulation facile au milieu des quelques 15000 personnes présentes ce vendredi. Deux écrans géants encadrent la scène principale, un troisième est adossé à la régie et tous diffusent le concert en cours pour le plus grand plaisir des yeux. Deux singes métalliques ornent un container judicieusement placé entre les scènes, les bars et les toilettes, créant de fait le point de rendez-vous idéal des fêtards dispersés.  Plus loin et plus tard, le château du Port Mulon s’illuminera d’une projection aux couleurs du festival et les arbres danseront dans les lumières.

Ballon Nuit de l'Erdre le parc du port mulon

Si le singe est très présent depuis plusieurs années à La Nuit de l’Erdre, une étape a été franchie cette année avec un engagement dans la défense de l’habitat naturel des grands singes, à travers les ventes aux enchères (qui auront lieu durant l’été) d’instruments de musique dédicacés par les artistes présents au festival, et dont les bénéfices seront intégralement reversés à l’association Gorilla.

Singe Nuit de L'Erdre

Les mascottes du festival

Ultra Vomit, la fraîcheur pipi-caca

Même si les quatre nantais, fleurons du métal parodique francophone, affichent complet partout depuis leur dernier album “Panzer Surprise” et préparent leur premier Olympia en novembre 2018, ils avoueront leur surprise d’avoir été sollicités pour jouer entre Catherine Ringer et The Hives. Par l’humour, ils prouveront que cette place n’est pas volée, tant ils réussiront le tour de force de faire adhérer un public non-averti aux sonorités les plus extrêmes qu’offrent leur metal. Permettant à leurs “clients” d’effectuer une saine régression pour choisir leur camp entre pipi et caca, les gentils metalleux auront su séduire une audience enthousiaste par leur show mixant gros son et spectacle comique.

The Hives : patrons sans efforts

Le groupe suédois qui avait déjà foulé le sol Nortais en 2014, est revenu en grandes pompes pour ce 20ème anniversaire. La bande à Pelle Almqvist offre un concert de qualité, entrecoupé d’interventions prétentieuses et délicieusement hautaines qui forgent l’identité du groupe. Signe des grandes libertés scéniques que prennent les hommes en costard noir et blanc : les quelques (trop) longues minutes de présentation de chaque membre avant le dernier refrain de Tick Tick Boom. On regrettera tout de même les tempos un peu mous de Chris Dangerous  pour des morceaux qu’on attendait plus nerveux. La set-list a permis de faire un tour complet de la discographie du groupe : Hate to Say I Told You So, Two Timing Touch and Broken Bones, Come On!… les fans ont même étés récompensés par deux inédits : Stick up et Paint a Picture. Le concert s’achève sur un Return the Favor de haute volée.

Møme : candeur et décadence

Entouré par quatre écrans verticaux diffusant des images d’îles paradisiaques et de jeunes gens heureux, le DJ estampillé “Chillwave” proposera un show tout en bons sentiments. Lâchant parfois ses machines pour jouer quelques notes de guitare ou bien se faisant accompagner par un rappeur sur un morceau, Møme parvient à transformer la pelouse du festival en discothèque. Le public semble conquis et danse sous une marée de smartphones.

Justice : une croix sur la scène

Tête d’affiche de ce premier soir de festival, Gaspard Augé et Xavier de Rosnay étaient attendus de pied ferme par une bonne partie des festivaliers. Une scénographie très “rock”composée d’un mur d’amplis sublimée par un spectacle “son et lumière” captivant.  L’ambiance night-club initiée par Møme se poursuit, le dancefloor ne désemplit pas au fur et à mesure que les titres phares du groupes sont joués : Stress, D.A.N.C.E… On est heureux que la scène s’anime sous l’effet des projecteurs et des light-box car les deux musiciens restent plutôt statiques derrière leurs machines.

Justice en plein live

Justice en plein live

Ce premier soir se termine sans encombres et laisse repartir les festivaliers sourire aux lèvres.

Cash, puce et vie privée

Un bémol tout de même : le système “Cashless”, porte-monnaie électronique devenant la norme dans bon nombre de festivals. Ce système permet d’effectuer des transactions sur tous les stands du festival par simple scan d’une puce placée dans le bracelet du festivalier ou sur une carte en plastique. Si la promesse de facilitation des transactions est tenue, reste à éclaircir le point sensible de la nécessité de devoir renseigner ses informations personnelles pour récupérer le solde de son compte. Car comme spécifié sur le site du festival :

“Si vous ne souhaitez pas créer de compte Monkey, ni renseigner vos informations personnelles, le dispositif de paiement dématérialisé fonctionne tout de même. Cependant, vous ne pourrez recharger votre carte qu’aux banques situées sur le site du festival. Le remboursement de votre solde et le blocage de la puce en cas de perte seront impossibles, ces fonctions ne sont disponibles que si vous avez créé un compte Monkey au préalable.”

A l’époque où la protection de nos données est au centre du débat, il nous semble important de nous interroger sur cette nouvelle forme de récolte de data se résumant à retenir de l’argent sur un compte en échange d’informations personnelles.

Chargé de projets numériques et médiatiques chez Fragil depuis 2017, musicien, auteur, monteur... FX est un heureux touche-à-tout nantais. Il s'intéresse aux musiques saturées, à l'éducation aux médias, aux cultures alternatives et aux dystopies technologiques.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017