7 novembre 2024

L’Autre Cantine soutient les personnes précaires au-delà de sa cuisine

Avec son accueil de jour, son free-shop, ses événements de collecte de dons et sa distribution alimentaire journalière, L’Autre Cantine est une association qui ne manque pas d’idées pour soutenir les personnes dans la rue, exilées ou en situation de précarité.

L’Autre Cantine soutient les personnes précaires au-delà de sa cuisine

07 Nov 2024

Avec son accueil de jour, son free-shop, ses événements de collecte de dons et sa distribution alimentaire journalière, L’Autre Cantine est une association qui ne manque pas d’idées pour soutenir les personnes dans la rue, exilées ou en situation de précarité.

La distribution alimentaire et la façade colorée de l’association située juste derrière la gare de Nantes sont les aspects les plus connus de L’Autre Cantine, qui vient en aide aux personnes en situation de précarité. Sam, bénévole de longue date, présente les lieux en insistant sur le travail invisible réalisé par les différentes équipes de bénévoles : « Nous, on nous voit uniquement sous le prisme de la distribution ou de la confection de repas, alors qu’en amont, il y a toute une chaîne qui se met en place. Notamment la récup’ le matin, la gestion de la légumerie, du free-shop et du lieu. »

Un espace multifonctions

Ancien bar-hôtel, le 18 rue de Cornulier continue de proposer de multiples services à ses occupant·e·s. L’accueil de jour, ouvert de 13h à 18h, offre un espace de répit pour les personnes en situation de précarité. Elles peuvent y recharger leur téléphone, faire une sieste ou prendre un café. Tout était calme en ce lundi de novembre, mais les lieux peuvent devenir bondés en hiver avec 80 personnes entassées dans l’immeuble.

« C’est costaud, mais c’est marrant, moi j’aime bien. Ça gueule, ça s’embrouille, mais c’est une bonne ambiance », rigole Sam.

En plus de l’accueil, d’autres bénévoles s’affairent à trier les dons pour garnir les rayons du free-shop. À l’étage, les trois anciennes chambres d’hôtel transformées en friperie accueillent environ 60 femmes et 30 hommes chaque samedi après-midi. On y distribue des vêtements et des kits d’hygiène. Sam rappelle que l’association a toujours besoin de ces produits d’hygiène, qui viennent rapidement à manquer, tout comme de vêtements pour hommes. En ce début d’hiver, L’Autre Cantine lance également un appel aux dons de couvertures, de taies d’oreiller, d’écharpes et de gants.

Sam explique les différentes sections du free-shop à l’étage du bâtiment dont il gère principalement l’accueil et l’approvisionnement. Crédit : Amandine Masson – 4 novembre 2024

Le côté « Cantine »

Tous les jours, des équipes de bénévoles se relaient pour préparer des repas à 150, voir 200 personnes, chaque soir. Dès 9h, quelques bénévoles comme Didier prennent le camion aux couleurs de la GRDF[1] pour aller faire de la récupération dans les grande surface ou les boulangeries. De son côté, Amina, bénévole depuis 7 ans, réalise plusieurs tâches différentes : elle décharge et range les denrées alimentaires le matin, fait les courses et les répartie sur la semaine.

« Déjà qu’ils dorment dehors, qu’ils n’ont rien. Toute la soirée ils dorment dehors, marchent. Nous on donne un repas une fois le soir, et pour moi c’est quelque chose de bien. C’est pour cela que je suis restée aider », confie celle qui dès le premier jour s’est fait surnommer  « Mamma Djibouti ».

Dans la cour arrière du bâtiment, une dizaine de bénévoles réguliers ou ponctuels s’affairent pour la découpe chaque après-midi. Crédit : Amandine Masson – 4 novembre 2024.

L’ancien terrain de pétanque demeure un espace de rencontres, car c’est à l’extérieur qu’ont lieu la découpe des légumes et les réunions hebdomadaires. La cuisine, rudimentaire, est menée par des habitué·e·s des fourneaux. Même si la base du menu est toujours la même (riz ou semoule accompagnés de légumes), Sam révèle l’ingrédient secret de L’Autre Cantine : « L’idée c’est que ce soit des personnes exilées qui cuisinent pour mettre en valeur leurs cultures. Donc, il y a une personne qui va faire son mafé, une autre son couscous et puis l’autre va faire son riz spécial… spécialement bien épicé ! »

À 18h, c’est l’heure de la distribution. L’équipe de bénévoles remplit le camion de la nourriture et des couverts, puis, file au marché Talensac pour distribuer les repas.

Des événements reconnus par le milieu

En plus de ces tâches régulières, l’association peut compter sur l’engagement de ses bénévoles pour organiser des événements mensuels comme des soirées culturelles dans les bars nantais ou des friperies solidaires. L’objectif de ces événements est d’abord de récolter de l’argent pour couvrir les frais de l’association (courses pour compléter les repas, assurances, essence et frais courants), mais aussi de visibiliser l’association et de créer des espaces de vivre-ensemble.

Une soirée pour la trêve hivernale est d’ailleurs prévue ce samedi 9 novembre dès 15h à Décadanse et la prochaine friperie solidaire se déroulera au Labo Diva le 7 décembre de 11h à 18h. Les partenariats ponctuels avec une panoplie d’acteurs de la ville montrent qu’après 6 ans d’existence L’Autre Cantine est bien ancrée dans le milieu nantais.

 

[1] Gaz réseau distribution France

 

Cet article a été rédigé en collaboration avec Amandine Masson.

Née au Québec, Montréalaise d’adoption, Valérie a traversé l’Atlantique et s’est installée à Nantes il y a quelques mois par amour. Par amour pour son copain français d’abord, mais aussi par amour pour la nature et l’offre culturelle présente à Nantes.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017