• Emmanuel Gibouleau à la projection du film "7 femmes" de Sara Rastegar dans le cadre du festival "Iran en Révolutions".
23 mai 2024

Le Cinématographe : engagé artistiquement et politiquement

Depuis le 9 avril, le festival “l’Iran en Révolutions” organisé par Cosmopolis, propose expositions, films, conférences et concerts à ceux qui s’intéressent aux révoltes iraniennes de 1979 à aujourd’hui. Emmanuel Gibouleau, directeur depuis 10 ans du Cinématographe à Nantes, nous éclaire sur la participation du plus vieux cinéma de la ville au festival. Celle-ci est une collaboration à la fois artistique et politique inscrite dans le contexte actuel.

Le Cinématographe : engagé artistiquement et politiquement

23 Mai 2024

Depuis le 9 avril, le festival “l’Iran en Révolutions” organisé par Cosmopolis, propose expositions, films, conférences et concerts à ceux qui s’intéressent aux révoltes iraniennes de 1979 à aujourd’hui. Emmanuel Gibouleau, directeur depuis 10 ans du Cinématographe à Nantes, nous éclaire sur la participation du plus vieux cinéma de la ville au festival. Celle-ci est une collaboration à la fois artistique et politique inscrite dans le contexte actuel.

« On voit en fonction des thématiques si on peut rebondir ou pas, là sur l’Iran il y avait matière à faire quelque chose” rapporte Emmanuel Gibouleau. En effet, les évènements de septembre 2022 en Iran ont remis au centre de l’attention le sujet des luttes iraniennes et ont donné la volonté au cinéma de diffuser ces oeuvres. Par exemple le film documentaire « 7 femmes » de Sara Rastegar dépeignant la vie de sept femmes au sein de la société en iranienne de 2007.

“C’est un pays qui a une cinématographie plus qu’intéressante”

Emmanuel Gibouleau à la projection du film "7 femmes" de Sara Rastegar dans le cadre du festival "Iran en Révolutions".

Emmanuel Gibouleau à la projection du film « 7 femmes » de Sara Rastegar dans le cadre du festival « Iran en Révolutions ».

Emmanuel Gibouleau nous confie que la collaboration du Cinématographe avec Cosmopolis n’est pas seulement le résultat d’une actualité, elle émane d’un attrait pour le cinéma iranien : “Ce n’est pas du tout dans notre ligne éditoriale de passer un film qui serait uniquement support à débat de société”, il ajoute, “C’est un pays qui a une cinématographie plus qu’intéressante”.

« C’est le rôle qu’on s’est donné »

Ce n’est pas la première fois, que le Cinématographe ouvre le débat sur des thèmes politiques, depuis plusieurs années existent des “cycles” mettant en avant divers sujets toujours autant militants qu’artistiques : “On accueille depuis plusieurs années, au mois de janvier, l’association France Palestine Solidarité et son festival”. Emmanuel Gibouleau évoque également la diffusion de leur cycle “L’Amérique des Marges”, composé d’une vingtaine de films coïncidant avec l’élection de Trump en 2020, et celle d’un cycle intitulé “Cinéma, vie et politique”, qui « interroge la fabrique de la ville par rapport à la politique » explique-t-il. Éduquer les spectateurs, est une des missions que s’est fixé l’association du Cinématographe : « C’est le rôle qu’on s’est donné » déclare le directeur de la programmation.

La salle du Cinématographe lors de la diffusion du film documentaire "7 femmes" de Sara Rastegar dans le cadre du festival "Iran en Révolutions".

La salle du Cinématographe lors de la diffusion du film documentaire « 7 femmes » de Sara Rastegar dans le cadre du festival « Iran en Révolutions ».

« Nous rebondissons aussi sur ce que proposent les partenaires locaux”

Ces diffusions engagées reposent sur des collaborations fréquentes avec Cosmopolis, mais aussi sur la volonté de s’associer avec les acteurs qui entourent le cinéma associatif : “Nous sommes à l’initiative de projets, mais nous rebondissons aussi sur ce que proposent les partenaires locaux”. Car, en effet, l’Iran en Révolution est aussi le résultat de liens entre différents membres de l’association du Cinématographe et ceux de l’association “Femmes, vies, libertés”.

Léa, 19 ans, est étudiante en 3ème année de licence information-communication à Nantes. Journaliste en devenir, elle aime la création sous toutes ses formes, et possède surtout un réel attrait pour l’humain, ce qui l’a tout naturellement conduite à lancer le podcast Free Your Mind.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017