Un vent de fraîcheur soufflerait-il sur le Prix Goncourt ? Leïla Slimani, franco-marocaine née à Rabat et âgée de 35 ans, a remporté la sélection 2016 avec son second roman, Chanson douce (Gallimard). Elle s’opposait à Catherine Cusset, Régis Jauffret et Gaël Faye dans une sélection paritaire qui faisait la part belle aux moins de 40 ans.
Sans réduire l’auteure de Dans le jardin de l’ogre (2014, Gallimard) à un symbole, on constate que son profil est atypique dans le cadre de cette institution vieille de 114 ans qui fait la pluie et le beau temps sur le marché du livre (un Goncourt s’écoule en moyenne à plus de 345 000 exemplaires). Car derrière le symbole, les chiffres restent têtus. Le Goncourt est clairement le prix littéraire français le moins paritaire avec 10,6 % de lauréates contre 15,5 % pour le Renaudot, 19% pour le prix de Flore et le Médicis, 35,7 % pour le Goncourt des lycéens, 37,2 % pour le prix Femina.
Leïla Slimani est aussi plus jeune que la moyenne des primés au Goncourt (41,8 ans). Il faut remonter à Laurent Gaudé en 2004 (Le Soleil des Scorta, Actes Sud) pour trouver un lauréat plus jeune qu’elle (32 ans). L’auteure est enfin, avec Tahar Ben Jelloun, l’un des deux lauréats nés au Maroc. Seul 22 % des écrivains primés au Goncourt son nés à l’étranger.
Leïla Slimani, un symbole ? Pas si simple… Car elle ne dénote pas sur un point : sa maison d’édition, Gallimard, qui représente un tiers des lauréats dans l’histoire du Goncourt. Le mot valise « Galligrasseuil » (pour désigner l’omniprésence des maisons d’édition Gallimard, Grasset et Seuil) n’a jamais été aussi pertinent. Les quatre finalistes du Goncourt 2016 provenaient de l’une de ces trois maisons.
Pierre-Adrien Roux / octobre 2016
Photo : Librairie Decitre à So Ouest