19 mars 2019

Les cafés-concerts acteurs majeurs de la scène musicale nantaise ou quand le rock frappe à la porte des « rades » de la cité des Ducs

Au Château de Nantes on aime le rock et on le met à l’honneur. Dans le cadre de l’exposition « Rock ! une histoire Nantaise » ouverte au public depuis le 24 février 2018 et jusqu’au 10 novembre 2019, Laurent Charliot, commissaire de l’expo et féru de rock, a proposé au Château samedi 9 mars une table ronde composée de responsables de cafés-concerts d’hier et aujourd’hui. Arnaud Piccoli responsable du Dynamo rue du Maréchal Joffre à Nantes , Maxime Pasquer en charge de la programmation au Ferrailleur situé au Hangar à Bananes, Patrick Malassis responsable du Canon à Pat’ à Rezé et autrefois gérant du Maltais, Sonia Le Corre à la programmation du Black Shelter à Carquefou et Denis Tallédec directeur du collectif Culture Bar Bars. L’occasion de revenir sur la genèse des « cafés-conc » à Nantes.

Les cafés-concerts acteurs majeurs de la scène musicale nantaise ou quand le rock frappe à la porte des « rades » de la cité des Ducs

19 Mar 2019

Au Château de Nantes on aime le rock et on le met à l’honneur. Dans le cadre de l’exposition « Rock ! une histoire Nantaise » ouverte au public depuis le 24 février 2018 et jusqu’au 10 novembre 2019, Laurent Charliot, commissaire de l’expo et féru de rock, a proposé au Château samedi 9 mars une table ronde composée de responsables de cafés-concerts d’hier et aujourd’hui. Arnaud Piccoli responsable du Dynamo rue du Maréchal Joffre à Nantes , Maxime Pasquer en charge de la programmation au Ferrailleur situé au Hangar à Bananes, Patrick Malassis responsable du Canon à Pat’ à Rezé et autrefois gérant du Maltais, Sonia Le Corre à la programmation du Black Shelter à Carquefou et Denis Tallédec directeur du collectif Culture Bar Bars. L’occasion de revenir sur la genèse des « cafés-conc » à Nantes.

Cette table ronde réunissant Arnaud Piccoli, responsable du Dynamo rue du Maréchal Joffre à Nantes, Maxime Pasquer, en charge de la programmation au Ferrailleur situé au Hangar à Bananes, Patrick Malassis, responsable du Canon à Pat’ à Rezé et autrefois gérant du Maltais, Sonia Le Corre, à la programmation du Black Shelter à Carquefou, et Denis Tallédec, directeur du collectif Culture Bar Bars, fut l’occasion de revenir sur la genèse des « cafés-conc » à Nantes.

Un peu d’histoire…

Les cafés-concerts ne datent pas d’aujourd’hui. Comme le rappelle Laurent Charliot, « c’est une vieille tradition qui date du 19ème siècle » pour les troubadours qu’on faisaient rentrer dans les tavernes par temps de pluie. Le véritable essor des cafés-concerts rock vient d’Angleterre dans les années 60. En France on attendra la fin des années 70 et début des années 80 pour aller applaudir et danser sur du rock dans les cafés ou bars.

De gauche à droite: Denis Tallédec, Laurent Charliot, Sonia Le Corre, Patrick Malassis, Maxime Pasquer

Le principe est simple « le taulier du bar augmente légèrement le prix de ses boissons pour lui permettre de rémunérer un artiste qui lui à l’opportunité des faire ses premières scènes ».

Nantes a tout de suite adhéré à ce concept et les premiers cafés-concerts commencent à fleurir fin des années 70 avec un essor dans les années 80-90 avec des lieux qui deviennent emblématiques comme La Duchesse Anne, Le Zéphyr, Le Madrigal, le Michelet, le Maltais, le Violon Dingue ou le Floride.

Blues, Reggae, Jazz, Rock, la programmation est éclectique et il y en a pour tous les goûts musicaux. On y allait pour la musique mais aussi « pour l’ambiance avant tout » comme le souligne Patrick Malassis. Aussi, on « avait surtout affaire à des groupes rock qui donnaient d’abord leurs tripes, pas à des carriéristes et pour les cafés c’était la convivialité avant tout ».

A cette époque, pas d’internet ni de réseaux sociaux donc les groupes se refilent les bons tuyaux sur où et qui contacter pour jouer. Des groupes de Brest, d’Angers mais aussi étrangers défilent alors dans les cafés-concerts nantais. Arnaud Piccoli du Dynamo note cependant qu’à l’heure actuelle les groupes fonctionnent toujours ainsi en s’échangeant les bons plans pour monter les tournées.

Dans les années 80 et 90 la popularité des cafés-concerts explose et ils se développent pour accueillir et proposer de plus en plus de concerts.

Le Michelet est un des premiers bars à mettre une salle à disposition pour les groupes. « On ne pousse plus le baby foot ou la table de billard mais on met en place une salle, une sonorisation quasi permanente pour que les groupes puissent jouer » indique Laurent Charliot.

Le Floride, plus dans l’esprit « club rock », a reçu dans les années 90 des groupes comme Noir Désir ou Divine Comedy. En juin prochain, il fêtera ses 40 ans. Maxime des Ferrailleurs applaudit cette longévité : « je tire mon chapeau de tenir la même boutique avec la même passion » et Laurent Charliot de renchérir « c’est un exploit, y’a pas d’autres villes en France où il y a un club rock comme ça qui tient depuis 40 ans ».

Le Maltais représenté ici par Patrick Malassis a reçu plus de 500 groupes pendant 10 ans de 1987 à 1997. L’aventure est née d’une « envie commune » avec son frère Thierry de monter un café rock pour « se faire plaisir et pour porter la bonne parole à Nantes ». Patrick se souvient qu’au départ l’accueil des autres cafés-concerts n’était pas des plus chaleureux et l’ouverture du Maltais n’était pas très appréciée par peur de concurrence. Ce qui n’était pas l’idée de Patrick et son frère : « nous on voyait plus ça comme un complément. Plus il y a d’endroits qui font des concerts, plus les gens se déplacent et vont aux concerts ». Les groupes reçus par Patrick et son frère sont nourris logés et payés à la majoration sur les consommations. « Un groupe pouvait toucher dans sa soirée 2000 francs ce qui était pas mal à l’époque ». L’ambiance était plutôt animée au Maltais et Patrick se souvient devoir faire le videur pour calmer les esprits de certains jeunes un peu énervés, « le public était moins policé que maintenant ». Après 10 ans à la tête du Maltais, Patrick se dirigera ensuite vers la restauration et tient à présent la brasserie Le Canon à Pat’ à Rezé qui propose aussi des concerts à certaines dates.

Le Violon Dingue, autre café-concert nantais bien connu à l’époque, avait la particularité d’avoir une programmation plus semi-professionnelle et de proposer des concerts le dimanche soir. Les Elmer Food Beat y ont joué souvent dont un soir où l’entrée était gratuite pour les filles et interdite aux garçons. Sur l’affiche du concert était indiqué : « entrée à 5000 dollars pour les garçons ». Arnaud du Dynamo se rappelle qu’un garçon avait réussi à rentrer au concert déguisée en fille !.

Toujours dans les années 80-90, en périphérie du centre de Nantes, citons La Route du Rhum à la programmation très éclectique avec du Rock, du Jazz , de la World Music etc… Le Saint Domingue à l’ambiance chaude et électrique et où le groupe La Mano Negra y a joué plusieurs fois en 1992 en préparation de sa tournée en Amérique du Sud avec le Royal de Luxe.

Les années 90 marquent un tournant car de nouvelles législations sur le bruit sont mises en places qui éliminent la puissance de la sonorisation à l’intérieur et à l’extérieur des cafés-concerts et qui « vont mettre hors la loi un certain nombre d’établissements » comme le souligne Laurent Charliot. En effet ces nouvelles normes anti-bruit nécessitent d’importants travaux aux gérants des cafés-concerts et beaucoup n’ont pas les moyens financiers de les effectuer. Des fermetures administratives d’établissements sont alors à déplorer.

En 1995 est créé la Fédération Française des Cafés-Concerts de Loire Atlantique dont les membres sont entre autres le Maltais, La Route du Rhum, le Violon Dingue mais aussi des salles municipales. Le mélange avec ces salles de la ville de Nantes ne fait pas bon ménage comme se souvient Patrick Malassis, « on n’avait pas les mêmes valeurs ».

Plus fédérateur, le collectif Culture Bar Bars créé en 1999 par Eric Lejeune et qui propose chaque année en novembre des concerts pendant une semaine au sein des établissements des membres du collectif. Au-delà de ce festival, Culture Bar Bars soutient ses 500 adhérents – grands ou petits établissements- et est un interlocuteur privilégié entre les patrons de bars et les pouvoirs publics.

Les cafés-concerts aujourd’hui

Plusieurs établissements sur Nantes sont à citer : Le Live Bar, le Chat Noir, le Ferrailleur, le Dynamo, la Scène Michelet, le Black Shelter, le Triolet…

Le Dynamo -Copyright photo Le Dynamo-

Les difficultés majeures que les cafés-concerts connaissent sont bien sûr les charges qu’ils doivent versées au pouvoir public et à la SACEM ainsi que les normes de sécurité drastiques à respecter. Aussi les nuisances sonores de la clientèle à l’extérieur des établissements engendrent des plaintes du voisinage auprès des cafés-concerts. La loi anti-tabac dans les lieux publics, aussi bénéfique soit elle pour la santé, n’aide pas au bon voisinage.

Le Black Shelter, lui a fait le choix d’ouvrir en périphérie de Nantes à Carquefou en 2014. Est-ce que la solution c’est sortir des villes pour faire du bruit ? « Oui » nous répond Sonia Le Corre programmatrice du lieu qui nous explique le scepticisme de certains quant à l’emplacement du lieu. Finalement le public est bien présent et le Black Shelter a ouvert une salle de concert de 220 places il y a 1 an.

Le Black Shelter -Copyright photo Le Black Shelter-

Pas de problème de voisinage non plus pour le Ferrailleur situé au Hangar à Bananes. Ce café-concert ouvert depuis 2007 et  à la programmation rock/métal française peut accueillir 280 personnes. Après les concerts, le Ferrailleur se transforme en club pour danser.

Le Ferrailleur -Copyright photo Le Ferrailleur-

L’avenir ?

Les cafés-concerts bénéficient d’un public fidèle, il faut cependant veiller à s’adapter aux nouvelles habitudes des noctambules.

« La nuit a évolué » comme le souligne Denis Tallédec de Culture Bar Bars. « Les jeunes n’ont plus envie d’être enfermé avec un ticket d’entrée à 20 euros ». Le modèle anglo-saxon est dans ce sens intéressant : un live en début de soirée puis un DJ en seconde partie.

 

Liens internet :

Culture Bar Bars

Le Ferrailleur

Le Dynamo Café

Le Black Shekter

Le Canon à Pat

 

 

 

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L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017