Une épicerie, le Soudan Bazar, a ouvert au printemps dans le centre-ville. Un peu vegan, un chouïa hallal, on y trouve tout plein de produits naturels du monde (dont du café épicé délicieux et introuvable ailleurs).
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Mutassim, le gérant de 26 ans, qui compte agrandir sa boutique prochainement en louant le local attenant, s’adresse à ses compatriotes, qu’il estime à environ un millier dans le coin, mais aussi aux Somaliens, Yéménites, Érythréens de Nantes en quête de denrées compensant le mal du pays. Et pas que. Il compte également sur la curiosité des gens de tous horizons…
Ce n’est pas lui qui a choisi Nantes, « c’est la guerre ».
Quand je lui demande de me raconter son histoire et pourquoi il a choisi Nantes, Mutassim Adam Mohamed, regard franc et voix douce, me reprend : ce n’est pas lui qui a choisi Nantes, « c’est la guerre ». Originaire de Geneina, capitale administrative du Darfour occidental, il m’explique qu’il y a là-bas une ségrégation entre Noirs (étymologiquement, Soudan tire son nom de la locution arabe bilad assoudan, le « pays des Noirs ») et Arabes (qui composent 70% de la population, et qui sont au pouvoir). Ex-colonie britannique, on parle officiellement anglais et arabe, dans ce pays musulman où la douceur de vivre n’est pas de mise, et depuis un temps. Le père de Mutassim s’est fait tuer, son oncle aussi. Rester, c’était y passer à coup sûr.
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Saveurs d’ailleurs
Ouvrir un commerce dans une ville de province en France a été une question de survie. Y parvenir n’a pas dû être simple mais Mutassim ne s’étendra pas sur le sujet. Sourire aux lèvres, il me montre fièrement ses sachets d’épices, de falafels, d’ « okra » (variété de gombos), « molokhia » surgelée (variété d’épinards) et puis un ingrédient méconnu, l’ « abré », spécialité soudanaise, sorte d’écorce à préparer en décoction pour faire un jus « spécial ramadan » , qu’il m’offre pour que je le goûte.
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Son père lui avait appris qu’il fallait « pratiquer des prix bas pour attirer de nombreux clients »
De la gomme arabique (le Soudan en est le 1er producteur mondial), du sirop de dattes, du jus de bissap prêt à boire (produit à Angers!), des feuilles de vigne en boîte, de l’encens traditionnel, des jujubes en sachet à consommer en snack apéritif ou digestif, du manioc frais, des haricots tropicaux importés d’Angleterre et qu’il vend peu cher, parce que son père lui avait appris qu’il fallait « pratiquer des prix bas pour attirer de nombreux clients ». Voilà, entre autres choses, ce que l’on peut trouver dans ce joyeux bazar. Les locavores trouveront peut-être à y redire mais le soleil brille pour tout le monde.
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Quand il n’est pas dans sa boutique, ouverte 7 jours sur 7, Mutassim étudie l’informatique à l’université. Il dit que plus tard, proposer un service de plats soudanais à emporter n’est pas une mauvaise idée. On est d’accord.