Le livre témoigne d’un quotidien pas si lointain où la ville syrienne de Daraya, banlieue rebelle de Damas, connaissait davantage le son des bombes et l’odeur des gaz chimiques que la douce mélodie du bonheur. De 2012 à 2016, une quarantaine de jeunes révolutionnaires ont résisté à l’ampleur de la guerre civile menée par l’armée de Bachar El Assad. Ce livre ne témoigne pas seulement de cette guerre, il met en lumière des hommes et des femmes qui nous donnent de véritables leçons de vie.
[aesop_image imgwidth= »60% » img= »https://www.fragil.org/wp-content/uploads/2018/02/Fadi-DiraniDaraya-media-centerLe-Figaro.jpg » credit= »Fadi Dirani / Daraya media center / Le Figaro » align= »center » lightbox= »on » caption= »La bibliothèque de Daraya » captionposition= »center » revealfx= »off » overlay_revealfx= »off »]
Je préfère vous prévenir, ce livre n’est pas un livre que l’on prend pour s’émerveiller, il n’est pas non plus fait pour s’échapper du quotidien. Ce livre nous confronte à la réalité, il nous prend et nous bouscule dans un quotidien parfois bien rangé. Il nous amène à réfléchir sur le sens réel du verbe vivre et sur sa signification à travers le monde.
Delphine Minoui commence son récit par le moment où elle a été confrontée à cette photo, cette photo qui sera la ligne directrice de ce livre. Le témoin direct qu’une bibliothèque cachée peut exister malgré l’attaque des balles, que lire se conjugue toujours au présent malgré la guerre.
[aesop_image imgwidth= »60% » img= »https://www.fragil.org/wp-content/uploads/2018/02/Delphine-Minoui-©ParisMatch.jpg » credit= »Paris Match » align= »center » lightbox= »on » caption= »La journaliste Delphine Minoui » captionposition= »center » revealfx= »off » overlay_revealfx= »off »]
A travers ce livre, Delphine Minoui nous relate ces échanges par Skype avec les révolutionnaires, ces hommes qui ont décidé que les livres étaient le meilleur rempart à l’obscurantisme. « La lecture, ce modeste geste d’humanité qui les rattache à l’espoir fou d’un retour à la paix. A l’ombre de la guerre, les phrases peuvent de nouveau vibrer. Elles sont la marque du temps qui reste quand tout est condamné à disparaître. ». Ces mots ne sont qu’un extrait des richesses de leur parole. La lecture s’avère être bien plus qu’un échappatoire. Les livres leur donnent les clefs pour s’inscrire dans le présent, pour développer leurs idées au niveau de la politique, des valeurs sociétales dans un environnement où cela ne devrait pas exister. Les lectures sont aussi un moyen de partager et d’échanger avec les autres, de s’éveiller sur des sujets qui interpellent tel que le développement personnel. L’alchimiste de Paulo Coelho est le livre qui a été le plus partagé au sein de la bibliothèque. Plus qu’une leçon de vie, il nous apprend qu’il faut suivre le chemin qui nous est destiné. C’est une réelle dose d’optimisme pour ces hommes et ces femmes.
Les livres permettent à ces hommes de trouver une cohérence dans l’incompréhension qui les entoure. Chaque histoire, chaque phrase met des mots, des noms sur l’inexprimable. Ils ont recours à l’ensemble des images présentes dans la mémoire collective. C’est une forme de réalité dans un quotidien de cauchemar. « Il croit aux livres, il croit en la magie des mots, il croit aux bienfaits de l’écrit, ce pansement de l’âme, cette mystérieuse alchimie qui fait qu’on s’évade dans un temps immobile, suspendu. ». Il est important de se raccrocher à la réalité quand on est bercé de désillusions pertinentes. Ce n’est pas seulement un hymne à la vie, c’est une quête de sens pour continuer à croire que tout est possible, que tout est réalisable. La littérature peut faire apparaître des bornes temporelles quand les jours défilent au crépitement des balles.
Dans son livre L’Écriture ou la vie, Jorge Semprun ne nous dépeint pas les abominations du camp de Buchenwald telles qu’elles, il les met en lumière au travers de scènes d’opéra, de pièces de théâtre ou encore de douces notes de musique. L’art est une voie, un support qui permet d’expliquer l’Histoire, il est révélateur de la liberté d’expression. Il permet de donner des repères au lecteur parfois désarçonné par le quotidien. “La vérité essentielle de l’expérience, n’est pas transmissible”.
Je pourrais continuer à parler de ce livre mais ça serait trop vous en dévoiler. Voici une dernière citation du livre qui montre que l’espoir persiste toujours malgré la noirceur de la guerre : « L’espoir, malgré tout. L’espoir cultivé dans ce jardin potager improvisé sur le recoin d’une terrasse. L’espoir dans ces tournesols qui s’échappent d’une terre sèche et polluée. L’espoir dans cet arbuste planté au milieu d’un cratère creusé par un obus. ».
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