2 mars 2020

Rencontre.s Mouvement.s : La libre association

Offrir à de jeunes exilés, nombreux sur Nantes, un espace de rencontre, incluant l’expression corporelle, la danse, tel était le pari de Sandra Walle danse thérapeute et Cécile Heulin éducatrice spécialisée, toutes deux formées à la danse et engagées au sein de « la libre association ». Cette dernière basée dans le quartier de la Bottière a pour objectif de développer la création individuelle et collective par des ateliers artistiques.

Rencontre.s Mouvement.s : La libre association

02 Mar 2020

Offrir à de jeunes exilés, nombreux sur Nantes, un espace de rencontre, incluant l’expression corporelle, la danse, tel était le pari de Sandra Walle danse thérapeute et Cécile Heulin éducatrice spécialisée, toutes deux formées à la danse et engagées au sein de « la libre association ». Cette dernière basée dans le quartier de la Bottière a pour objectif de développer la création individuelle et collective par des ateliers artistiques.

Le corps en mouvement

En 2017, elles ont élaboré et mis en œuvre un projet – soutenu par différentes institutions dont la ville de Nantes et le département – qui s’articule autour du mouvement et des rencontres. Parce que les relations ne passent pas que par la parole, d’autant plus avec un public de nationalités différentes, à la fois francophone et anglophone. S’exprimer par le corps libère, permet de se découvrir et fait émerger ses ressources personnelles et créatrices.

L’atelier libre expression

En 2018, après avoir mobilisé le public auprès des acteurs locaux chargés d’accompagner les jeunes migrants mineurs et majeurs, et diffusé des flyers pour informer le public du quartier, des ateliers hebdomadaires ont débuté  le samedi après midi, ouverts à tous. Ils ont maintenant lieu à la Maison des associations Mangin Beaulieu. S’y retrouvent de jeunes exilés, mais aussi des habitants intéressés. Y participer est sans engagement ; l’adhésion à l’association est gracieuse pour les jeunes migrants et selon leur possibilité pour les autres personnes.

Chaque séance débute par un temps d’échange convivial. Les consignes sont données à la fois en anglais et en français. Faire connaissance de façon ludique pour intégrer les prénoms de chacun, apprendre à respirer, sentir la variation de son poids, écoutes rythmiques, jeux d’improvisations, une large palette de techniques, de supports artistiques apportés par les animatrices pour libérer les corps mais aussi communiquer autrement entre les personnes… Afin d’enrichir cet atelier, d’autres facettes de pratiques artistiques sont proposées avec d’autres artistes qui interviennent ponctuellement, musiciens, chorégraphes, art-thérapeute….

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Des envies partagées et réalisées

Parallèlement, au fur et à mesure que les jeunes se connaissent mieux, des envies émergent et se croisent avec des propositions faites par les 2 danseuses. Ainsi, aller à la découverte du territoire et de ses ressources pour aider les jeunes à se poser, les accompagner vers les offres culturelles de la ville, leur permettre de prendre leur place comme citoyen, malgré leur situation incertaine et ainsi fédérer le groupe. Il faut noter que 95 jeunes ont participé à ces ateliers, ponctuellement ou régulièrement en 2019. Le bouche à oreille permet l’arrivée de nouveaux participants.

L été dernier, les jeunes ont pu réaliser, avec le soutien de leurs animatrices, une sortie au bord de la mer ; ce fut un moment très émouvant m’ont-elles confié, ils ont même dansé sur la plage !

De plus, quelques uns ont réalisé  des photos des ateliers, et une exposition a eu lieu dans un café du centre ville, belle récompense pour ces jeunes vivant au quotidien une situation très précaire.

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Le point d’orgue de l‘année 2019 a été de permettre à quelques  jeunes de monter sur la grande scène de « Stéreolux » dans la cadre d’une soirée, également consacrée à une autre réalisation faite avec des habitants de l’île de Nantes. Ils ont pu ainsi donner à voir tout ce qu’ils ont acquis et se dépasser, tout en étant accompagnés par Sandra. Un moment très fort, une reconnaissance dans la vie de ce projet.

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La parole d’un participant

[aesop_image imgwidth= »40% » img= »https://www.fragil.org/wp-content/uploads/2020/02/FF_0524.jpg » credit= »Jean-Félix Fayolle » align= »center » lightbox= »on » captionposition= »left » revealfx= »off » overlay_revealfx= »off »]

Originaire de Palestine, Islam a accepté de faire part de ses impressions.

Fragil : Comment avec vous connu cet atelier?

Islam : Je suis actuellement en service civique et j’ai rencontré d’autres jeunes qui m’en ont parlé, j’ai eu envie d’essayer. Je viens à cet atelier depuis environ un an.

Fragil : Qu’est ce qui vous a donné envie de poursuivre? 

Islam : La première fois que j’y ai participé j’ai trouvé ça cool, on a joué ensemble avec les autres participants. De plus le fait que cela soit le samedi, c’est bien, car le week-end ce n’est pas évident pour avoir des activités. De plus le lieu est facile d’accès pour moi.

Fragil : Qu’est  ce que vous apporte votre présence à cet atelier?

Islam : J’aimais déjà beaucoup la danse avant. Je pratique la danse hip hop. Je vais 2 à 3 fois par semaine, aux ateliers du Lieu Unique. J’aimerais apprendre d’autres styles de danse. Plus tard, j’aimerais bien en faire un métier. J’aime aussi la danse expression que l’on fait ici. Cela me fait vraiment du bien. D’ailleurs Sandra m’a proposé de co-animer un atelier avec elle pour aussi apprendre autre chose.

 

Avec les retours positifs des participants, et la belle dynamique créée, ce projet se poursuit, s’enrichit, grandit au fur et a mesure des années, grâce aussi à la qualité de l’accompagnement proposé.

Que vous soyez jeune exilé ou habitant d’un quartier, osez franchir la porte, même si vous n’avez jamais dansé ; c’est possible grâce au cadre chaleureux et bienveillant de ces ateliers.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017