25 juin 2021

« Stéréotypes, préjugés et discriminations » avec une classe élémentaire de l’école Saint-Pierre au Gâvre

Au nord de Nantes, dans la commune du Gâvre, l’école Saint-Pierre a fait pour la première fois appel à Fragil afin d’animer un atelier de deux heures autour des stéréotypes, des préjugés et des discriminations dans les médias, dans une classe de CE2, CM1 et CM2, le 10 juin 2021.

« Stéréotypes, préjugés et discriminations » avec une classe élémentaire de l’école Saint-Pierre au Gâvre

25 Juin 2021

Au nord de Nantes, dans la commune du Gâvre, l’école Saint-Pierre a fait pour la première fois appel à Fragil afin d’animer un atelier de deux heures autour des stéréotypes, des préjugés et des discriminations dans les médias, dans une classe de CE2, CM1 et CM2, le 10 juin 2021.

Pour la première fois, l’association Fragil est intervenue au Gâvre dans l’école primaire Saint-Pierre pour animer un atelier de lutte contre les discriminations, et d’éducation aux médias. Cet atelier a été financé par la DILCRAH en réponse à un appel à projet. L’atelier de deux heures a eu du succès auprès du groupe qui s’est montré attentif et participatif.

Dessine-moi une femme…

Après de brèves présentations de l’association et de l’équipe intervenante, il a été demandé aux enfants sur quoi allait porter cet atelier. Les élèves étaient au courant de la thématique qui allait être abordée, mais ont rencontré des difficultés à expliquer les termes stéréotype, préjugé, et discrimination. Un premier exercice a alors été proposé : les élèves, chacun munis d’une ardoise et d’un feutre, ont du dessiner en quinze secondes une femme, puis un chinois, et enfin une personne handicapée. Pris au jeu, on pouvait observer à travers leurs dessins des points communs entre eux : la femme était dessinée avec des cheveux longs et une robe, le chinois avec un chapeau pointu et des yeux bridés, et la personne handicapée en fauteuil roulant. Les enfants ont été invités à mener une réflexion autour de leur dessin, et pourquoi la majorité de ces derniers ont eu les mêmes caractéristiques. Il leur a été expliqué qu’ils s’étaient basés sur des stéréotypes, ces derniers étant des clichés : des idées toutes faites généralisantes admises par un groupe sur un autre. Afin qu’ils comprennent mieux cette notion, l’intervenant François-Xavier a commencé une phrase, et la classe devait la finir. Par exemple : “Les garçons sont…” “Sportifs”. Dire que les garçons sont sportifs est un stéréotype, car c’est une idée admise de la société sur les garçons. Tous les garçons ne sont pas sportifs.

Au fil de la discussion, s’ensuit la notion de préjugé qui découle de celle du stéréotype. En effet, le préjugé est un jugement préalable sur une personne, s’appuyant sur un stéréotype. Par exemple, “Je vois ce garçon, je me dis qu’il est sportif”.

Enfin, la notion de discrimination découle de celle de préjugé et donc de celle de stéréotype. La discrimination est le fait de traiter différemment un groupe de personne souvent de manière péjorative, tout en se basant sur les notions précédentes. Par exemple, “Je ne fais pas jouer les filles au foot, car elles ne sont pas sportives”. Ici, les filles sont discriminées car ne sont pas considérées comme sportives.

Ces exemples plus concrets ont permis aux élèves de distinguer les nuances entre les trois termes.

Réflexion autour de contenus médiatiques

Après une petite pause, la séance s’est poursuivie avec une analyse d’un article et d’une séquence télévisée, afin de trouver les discours discriminatoires qui s’y cachent.

Le premier article portait sur la tenue de la grande tenniswoman Serena Williams lors du tournoi Roland Garros. Le journaliste du Nouvelliste un quotidien suisse,  émet un jugement sur sa tenue jugée incompatible avec sa corpulence. Nous retrouvons ici un discours sexiste et grossophobe de la part du journaliste. La classe a trouvé cet article injuste, traitant simplement de l’apparence de la joueuse n’étant pas au goût du journaliste, et non de ses performances.

 

“Ce n’est ni insultant ni moqueur d’affirmer que l’Américaine n’a pas le physique adéquat pour se déhancher, sur un court, dans une combinaison aussi moulante qui met avant tout en évidence ses formes très généreuses.”

Article du journal Le Nouvelliste

 

Ensuite, les enfants ont regardé un extrait de l’émission télévisée “Salut Les Terriens” avec Nolwenn Leroy, dans lequel Laurent Baffie remonte la jupe de la chanteuse. Il a alors été demandé aux élèves de réagir à cette séquence et à ce qui a été dit, et de dire ce qui les a choqués ou non. La classe a été choquée par l’action de Laurent Baffie, et a aussi retenu la phrase qu’il a pu dire : “on veut du cul”. Le groupe a essayé de comprendre pourquoi il a dit ces mots, et en a conclu que c’est pour faire des vues et gagner de l’argent.

Un petit aparté est alors fait sur le fonctionnement économique des grandes chaînes de télévision; ces dernières gagnent de l’argent grâce aux annonceurs qui les payent pour être diffusés sur leur chaîne. Plus il y a de vues sur une chaîne, plus les publicitaires vont payer pour être diffusées. C’est pourquoi Laurent Baffie prononce cette phrase dénigrante et agit de cette manière, car il sait pertinemment que cette séquence fera des vues, et que les annonceurs vont en profiter, ce qui en fera donc profiter la chaîne.

Après cette discussion, les élèves ont été invités à se mettre par groupe de trois, et à identifier les responsables de cette séquence, afin de les classer selon leur degré de responsabilité. Groupe après groupe, les enfants ont exprimé leurs idées, toutes différentes les unes des autres. Que ce soit Laurent Baffie, le présentateur, le public, les marques ou bien le monteur de l’émission, chaque acteur à sa part de responsabilité dans cette séquence.

Un atelier concluant auprès de la classe

L’atelier a semblé être bénéfique pour les élèves en élémentaire, qui affirment avoir été “très intéressés” par le contenu de l’intervention, et que cette dernière leur a appris beaucoup de choses. Cette séance a notamment permis d’éveiller petit à petit leur esprit analytique.

 

Étudiante en information-communication, et stagiaire au sein de l'association Fragil !

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017